Une vingtaine de chrétiens venant en grande partie d’Haïti, mais également d’Amérique du Sud et du Québec, se sont réunis le dimanche 19 janvier pour célébrer le culte au milieu d’un amoncellement d’objets hétéroclites. Debout devant ces fidèles et quelques curieux, le pasteur Pierre est l’âme et le fondateur de ce magasin communautaire qu’il a baptisé Dieu l’a fait encore!.
«Dieu est ici ce matin! Il l’a dit: « Car là ou deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux ». C’est la vérité absolue! Mais il faut que tu prennes position. Alors tu vas pouvoir sentir sa présence. Tu vas pouvoir le toucher ce matin», lance le pasteur.
Son intervention est régulièrement interrompue par des «amen!» bien sentis. Des chants et des claquements de mains et quelques pas de danse viennent réchauffer les corps en ce jour où la température frôle les -20 degrés.
Situé sur la rue Hochelaga dans le quartier Mercier-Est à Montréal, le bric-à-brac Dieu l’a fait encore! est un espace hors du temps. Il accueille les brocanteurs, les passants à la recherche d’un bien usagé, et tous ceux qui ont besoin de chaleur humaine. Le pasteur Pierre, originaire d’Haïti, a ouvert son magasin communautaire non seulement pour répandre la bonne parole, mais également pour prendre soin des éclopés du système qui ne manquent pas dans ce quartier de la métropole.
«Je suis au Québec depuis 1995. Je suis pasteur indépendant depuis 25 ans», explique-t-il.
Parmi la petite vingtaine de fidèles se trouvait Micheline qui a créé sa propre fondation pour venir en aide aux démunis et aux Haïtiens. «C’est une sœur Teresa bien vivante! C’est une Haïtienne dans l’âme!», s’enthousiasme le pasteur Pierre.
Micheline est impliquée auprès des exclus depuis son adolescence.
«Déjà à l’époque j’étais convaincue que je devais prendre soin des pauvres. Je croyais que mes amies partageaient mes convictions. Pour moi, c’était tout à fait naturel.» Elle a compris très rapidement que ses camarades ne la comprenaient pas.
Aujourd’hui, grâce à l’appui de bénévoles, elle a créé une fondation qui vient en aide aux nouveaux arrivants. «Nous n’avons aucune idée de ce que peut représenter le fait d’être réfugié dans un pays inconnu. Quand tu quittes ton pays, avec ou sans ta famille, et que tu n’as pas de logement, pas de connaissance, pas de passeport, pas de médecin, cela prend du courage pour s’intégrer. Tu es souvent seul devant les imprévus de la vie. Ces gens n’ont pas toujours les moyens de se nourrir, de s’habiller convenablement, surtout l’hiver. Ils ne connaissent pas les lois ni les organisations susceptibles de leur venir en aide.»
Tout en parlant, elle jette un œil sur la porte d’entrée. Elle n’est pas la seule, d’ailleurs, à regarder en cette direction. «Nous attendons le député Mario Beaulieu du Bloc Québécois. Il viendra nous visiter. Il est un Haïtien dans l’âme! Il est comme Madame Micheline! Il a beaucoup parlé des immigrants et des Haïtiens. Voilà pourquoi je l’aime. Ce n’est pas parce qu’il est député que je le dis. C’est quelqu’un qui parle pour nous!», fait valoir le pasteur Pierre.
Ce dernier a présenté au député un projet pour aider les Haïtiens afin de les soulager un tant soit peu de la misère qui pèse sur ce peuple. Il envisage de faire venir des travailleurs saisonniers pour aider les fermiers du Québec à récolter les fruits et les légumes de leurs champs. «En invitant un homme à venir travailler dans les champs, nous aidons une famille complète.» Il espère pouvoir parrainer une cinquantaine de travailleurs saisonniers dès cet été.
Lors de sa brève allocution, le député Mario Beaulieu a soulevé la question des expulsions d’Haïtiens vers leur pays d’origine en perpétuelle crise sociale et économique. Il a rappelé que le Bloc Québécois a demandé au gouvernement fédéral de cesser d’expulser des personnes dont la sécurité personnelle serait menacée s’il y retournait.
Bien que la situation chaotique qui sévit en Haïti en inquiète plusieurs, les quelques fidèles réunis autour du pasteur Pierre gardent espoir et veulent agir pour leur venir en aide, mais également afin de soulager la misère d’ici.
«Ici, il y a tout! En Haïti, il y en a qui meurent de faim. Ici même, dans une journée il y a trois, quatre ou même cinq personnes qui viennent quémander quelques dollars pour manger.» Pour elles, il souhaite ouvrir un restaurant communautaire qui permettrait à tous ceux qui le désirent de venir partager un bon repas.
Voilà pourquoi il lance un appel aux donateurs chrétiens afin que le bric-à-brac Dieu l’a fait! se transforme en un véritable organisme d’aide et d’accueil ouvert à tous.
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