Le lancement officiel du documentaire Cœurs à cœurs consacré aux ursulines de Québec a eu lieu le 23 avril au Musée national des beaux-arts du Québec. Pendant 43 minutes, les quelque 200 personnes présentes dans l’auditorium ont tantôt ri, tantôt versé une larme devant l’œuvre de la réalisatrice Andrée de Billy, qui a pu compter sur l’aide de la réalisatrice Lise Bonenfant pour faire aboutir son projet.
Ancienne élève des ursulines, elle a voulu rendre hommage à ces religieuses qui ont accompagné tant d’enfants dans leur parcours scolaire au fil des décennies, véritables pierres de mémoire vivantes qui ont quitté leur monastère du Vieux-Québec à l’automne 2018.
Le documentaire donne la parole à ces femmes, dont les plus jeunes sont septuagénaires, afin qu’elles racontent leur vie, depuis leur désir de devenir religieuses jusqu’à aujourd’hui, alors qu’elles partent vivre dans une nouvelle résidence. C’est ce portrait intimiste qui domine le film, loin devant les éléments historiques et patrimoniaux.
Sur des musiques originales de Martin Caron à la fois gaies et mélancoliques, les spectateurs pénètrent dans l’ancien monastère fondé par sainte Marie de l’Incarnation et revisitent certains de ses lieux-phares, dont le grand escalier, la chapelle, le tombeau de la sainte et la bibliothèque.
«On était entourées de spiritualité», déclare une sœur dans les premières minutes de Cœurs à cœurs.
On découvre des sœurs issues de milieux socioéconomiques différents qui ont eu le désir de s’engager dans la vie religieuse. «Elles avaient l’air de femmes libres», confie sœur Pauline Duchesne. «Je n’ai jamais regretté.»
Elles évoquent le bonheur de vivre ensemble et la joie d’accompagner les enfants, qu’elles aimaient d’un «amour maternel», mais aussi les bouleversements dans l’Église du Québec dans la foulée du concile Vatican II et de la Révolution tranquille, qui se transposaient en la fin du cloître, ou le changement des habits ou des noms religieux.
Aucun sujet n’est tabou, alors que les sœurs se confient ouvertement sur des enjeux de société, comme la place de la religion dans la société, ou des enjeux personnels, comme le rapport à la sexualité. Elles parlent de foi, de leur vie, de féminisme, de la jeunesse, de l’avenir, etc.
Le documentaire fait aussi une place à d’anciennes élèves. Toutes évoquent avec émotion l’amour qu’elles ont reçu, l’encouragement dans les moments difficiles, et l’impact positif à long terme de leur passage chez les ursulines, qualifié par l’une d’elles de véritable «havre de paix».
«J’avais tellement été aimée»
La réalisatrice ne se contente pas ici de signer un travail: elle raconte avec tendresse une partie précieuse de sa vie en s’effaçant devant ces sœurs qui ont tant donné.
«Je pense que ça a touché les gens», a-t-elle confié à Présence quelques instants après avoir été chaudement applaudie pour son travail.
«Je suis touchée par les religieuses et leur propos universel, a indiqué Andrée de Billy. On voit toute l’évolution de leur vie spirituelle et je trouve que c’est réconfortant aujourd’hui d’avoir des personnes lucides, sereines, qui nous parlent ainsi.»
Aujourd’hui retraitée, Mme de Billy a fréquenté les ursulines entre l’âge de 8 à 12 ans.
«Toute ma vie, cet impact qu’elles ont eu sur moi, c’était un trésor. Je remerciais mes parents de m’avoir mis pensionnaire aux ursulines. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi. Mais quand j’ai passé du temps avec elles, j’ai compris une chose: j’avais tellement été aimée. Pas que je n’avais pas été aimée de mes parents ! Mais quand tu étais pensionnaire, elles s’occupaient de toi et il y avait quelque chose… elles m’aimaient avec mes petits défauts», a-t-elle confié.
Cette soirée de lancement était animée par la comédienne Marie Tifo, qui a déjà incarné Marie de l’Incarnation au cinéma et au théâtre, respectivement dans Folle de Dieu et La déraison d’amour.
Tout sourire, elle a confié qu’elle «jalousait» ses amies qui étaient pensionnaires chez les ursulines. Elle a expliqué avoir été très impressionnée par sa découverte du monastère lors du tournage de Folle de Dieu, mais l’avoir été encore plus par sa rencontre avec les religieuses qui l’ont «nourrie» et partagé leur expérience de vie avec elle.
Marie Tifo a expliqué que le projet du documentaire a vu le jour après une rencontre impromptue entre sœur Andrée Grégoire et Andrée de Billy, qui a immédiatement eu l’idée de faire un film sur les ursulines s’apprêtant à quitter leur monastère, s’engageant ainsi sur «un chemin d’un an» qui a abouti à Cœurs à cœurs.
Les profits amassés lors de la soirée de lancement seront convertis en bourses d’études pour les élèves de l’école des Ursulines de Québec et de Loretteville. En plus de plusieurs religieuses de diverses communautés et d’anciennes élèves qui assistaient à cette première, le cardinal Gérald Lacroix et l’évêque auxiliaire Marc Pelchat de l’archidiocèse de Québec étaient présents.
Bande annonceCoeurs à Coeurs from AdB Evolution on Vimeo.
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