On peut désormais visiter l’église historique Saint-Charles-Borromée de Charlesbourg grâce à une immersion virtuelle tout à fait spectaculaire. En cette période de confinement, ce projet mis en ligne au début du mois de mars revêt une importance décuplée.
Le public a désormais un accès virtuel illimité à l’intérieur de ce bâtiment patrimonial de la Vieille Capitale, siège de la paroisse la plus populeuse de l’archidiocèse de Québec.
«Ce n’est pas qu’une vue à 360 degrés », explique le gérant d’affaires de la paroisse Saint-Charles-Borromée, Steeve Guérard. «On peut se promener, avancer, reculer: c’est comme si on y était.»
[LIRE AUSSI: De magnifiques visites virtuelles pour oublier le confinement]
En plus de l’église elle-même, cette visite virtuelle donne aussi accès à la salle d’exposition permanente, à la grande sacristie, à la chapelle des congréganistes, à la galerie des curés et même aux combles de l’église, un endroit habituellement inaccessible au public.
La paroisse a pu compter sur une contribution financière provenant de l’Entente de développement culturel intervenue entre le Gouvernement du Québec et la Ville de Québec afin d’obtenir les 3000 $ nécessaire pour mener à terme ce projet.
«Nous avons eu un bon prix. C’était la somme que la ville octroyait. Nos finances sont toujours un peu serrées, et on privilégie notre mission pastorale plus que notre mission patrimoniale», explique M. Guérard.
Avec l’arrivée de la pandémie de coronavirus et la fermeture des églises, la paroisse a rapidement réalisé l’intérêt pastoral d’une telle initiative.
«On dit aux fidèles qu’ils peuvent se promener dans l’église et y faire le chemin de croix», dit-il. Avec le Vendredi saint qui approche, il encourage d’ailleurs ceux qui le souhaitent à tenter cet exercice grâce à la visite virtuelle, en suivant les stations accrochées sur les murs de l’église.
Signe du large attrait de cette immersion, il note que le cinquième des internautes provient de l’étranger.
«Les commentaires que nous recevons sont excellents. Notre principal défi est maintenant de faire connaître le projet», indique M. Guérard.
La passion du patrimoine
C’est grâce à Nelson Boisvert que cette numérisation a pu avoir lieu. Géographe de formation, il a travaillé pendant 25 ans pour Parcs Canada, notamment dans le développement des aires marines.
«J’ai le tatouage ‘protection du patrimoine’ au sens très large», lance-t-il. «Après les coupures du gouvernement de Stephen Harper en 2012, je me suis recyclé.»
Ce passionné de photographie commence alors à travailler pour Google et expérimente avec des technologies de représentation de l’espace. Il fonde Géo360 et se spécialise dans la captation immersive.
«Aujourd’hui on travaille avec des scanneurs. Une vue à 360 réalisée avec un appareil-photo, c’est joli mais ce n’est pas aussi immersif. Le scanner permet de faire la télémétrie des lieux et de parvenir à des projections tridimensionnelles. Ça permet d’avoir un plan au centimètre près. Au niveau de la technique, ce sont deux univers complètement différents», précise-t-il.
Selon lui, les possibilités pédagogiques et archivistiques sont énormes. «C’est un outil exceptionnel pour le monde scolaire. Tu peux amener à toi des lieux qui sont inaccessibles, peu importe leur emplacement dans le monde.»
La firme ne fait pas que des églises. Elle travaille sur des endroits variés, dont des pourvoiries ou des salles de montre pour concessionnaires automobile.
Cependant, Nelson Boisvert se donne comme objectif personnel de travailler à préserver la mémoire et l’esprit des lieux de culte.
«Je suis vers la fin de ma carrière, mais je me vois très bien comme géographe passer mes prochaines années à me promener à travers le Québec pour faire les églises!», confie-t-il.
Il faut préserver la mémoire et l’esprit des lieux de culte qui ont forgé notre histoire et notre patrimoine, croit-il. Et il est encore temps de le faire avant que trop de ces lieux aient été transformés… ou démolis.
Non seulement une telle opération permet-elle de produire des documents archivistiques pertinents, mais elle encourage le développement d’un sentiment d’appartenance au sein des communautés, fait-il valoir.
M. Boisvert a pu modéliser environ 200 lieux jusqu’ici, dont une quinzaine d’églises.
La première de ces églises est la chapelle de Tadoussac.
«Ça devient un outil de promotion touristique qui a une valeur muséale», estime-t-il.
Lorsqu’il sait qu’il aura l’occasion de numériser une église, il devient «comme un gamin qui attend Noël».
«C’est du bonheur à chaque fois!»
***