Le théologien Fabien Leboeuf, directeur général de Développement et Paix de 1996 à 2001, est décédé le mercredi 2 novembre 2022. Il était âgé de 80 ans.
Son décès est une immense perte pour le christianisme social québécois, estime Gisèle Turcot, l’actuelle supérieure de l’Institut Notre-Dame du Bon-Conseil. «Encore un militant qui part», lance-t-elle dans un soupir.
«Fabien, c’est un grand homme d’action, un passionné pour la justice», indique la religieuse qui l’a connu alors qu’il était, de 1973 à 1976, un employé laïc de l’Assemblée des évêques du Québec (AEQ).
Cette passion pour la justice, Fabien la devait notamment à la congrégation des Oblats de Marie-Immaculée, «bien implantée à Hull», en quartier populaire, là où Fabien et Lucie Bélanger, sa conjointe depuis 1966, ont vécu.
À cette époque, Fabien Leboeuf est non seulement professeur de théologie à l’Université Saint-Paul mais il milite aussi auprès d’organismes dont l’Association des locataires de l’Outaouais et la Ligue des droits de l’homme (aujourd’hui la Ligue des droits et libertés). Dans cette dernière association, il œuvre à l’organisation de visites auprès des personnes détenues à la prison de Hull en raison de la Loi des mesures de guerre.
C’est à l’automne 1973 que Fabien Leboeuf sera nommé adjoint au secrétaire général de l’AEQ. Responsable du dossier du laïcat, «on se disait entre nous qu’il aimait bien travailler avec les membres du comité des affaires sociales», se souvient Gisèle Turcot, qui deviendra plus tard secrétaire générale de l’AEQ. Il était très près d’évêques reconnus comme progressistes tels Bernard Hubert, Adolphe Proulx, Robert Lebel et Guy Bélanger (le frère de Lucie).
Un grand pédagogue
«Durant plusieurs jours, je n’ai pas accepté le décès de Fabien», confie son ami Michel Beaudin, lui aussi un théologien. L’ex-professeur agrégé de la Faculté de théologie et de sciences des religions de l’Université de Montréal dit aujourd’hui «accepter son départ en raison de l’immense héritage qu’il nous laisse».
Les deux théologiens ont travaillé ensemble à Développement et Paix, l’organisme de solidarité internationale de l’Église catholique. «Dans les domaines de l’engagement social et de la solidarité internationale, c’était mon mentor», dit-il. Un intellectuel et un homme d’action, Fabien Leboeuf «était aussi un grand pédagogue», ajoute-t-il, rappelant qu’il a conçu les premières campagnes d’éducation de l’organisme.
Le professeur honoraire souligne «la cohérence» que Fabien manifestait «entre sa militance et sa vie personnelle».
«C’était un merveilleux ami, j’ai beaucoup appris de lui. Il était très inspirant, son couple était inspirant», dit-il, confiant alors que depuis vingt ans, Fabien accompagnait Lucie, gravement malade. «Je sentais son désir d’accompagner Lucie jusqu’au bout. Et là, c’est lui qui décède», dit Michel Beaudin, la voix étranglée par l’émotion.
Directeur général de Développement et Paix depuis février 2022, Carl Hétu a bien connu son prédécesseur. C’est qu’il a travaillé à ses côtés de 1990 jusqu’en 2001, année où Fabien Leboeuf a quitté l’organisme au terme d’un mandat de cinq ans à la direction générale et de vingt autres années comme coordonnateur des campagnes d’éducation, de recherchiste et de directeur des projets internationaux.
«Il a été mon mentor», reconnaît aussi Carl Hétu, soulignant avoir été touché par «sa rigueur intellectuelle, sa droiture, sa grande spiritualité».
Alors animateur régional à Développement et Paix, l’actuel directeur général dit que Fabien avait un don pour vulgariser des dossiers difficiles. «Il pouvait nous résumer, en termes simples, toute une encyclique papale ou encore nous expliquer des problématiques complexes de l’enseignement social de l’Église». Il rappelle que Fabien a parcouru tout le Canada et prononcé de nombreuses conférences publiques lors de la campagne du Jubilé 2000 qui visait l’annulation de la dette des pays les plus pauvres.
Les détails des funérailles de Fabien Leboeuf ne sont pas encore connus.