Des évêques, les avocats qui représentent trois diocèses québécois ainsi que les avocats d’un cabinet qui défend plus d’une centaine de victimes d’abus sexuels de la part de membres du clergé participeront, à une «conférence de règlement à l’amiable». Cette rencontre se tiendra à Québec demain, le mardi 15 novembre 2022.
Les actions collectives menées contre l’archidiocèse de Québec et les diocèses d’Amos et de Trois-Rivières seront au cœur des discussions. Des observateurs doutent toutefois qu’au terme de cette rencontre, une entente soit conclue et annoncée.
Au moins deux évêques participeront à cette rencontre. L’évêque Martin Laliberté de Trois-Rivières y sera, a confirmé dimanche Simon Bournival, le responsable des communications de ce diocèse. Il ne mentionne toutefois pas si d’autres responsables l’accompagneront. «Je ne peux donner plus d’informations», a-t-il expliqué.
Pour le diocèse d’Amos, l’évêque Gilles Lemay ainsi que le vicaire général Raymond Martel sont attendus à cette conférence de règlement à l’amiable. «Nous souhaitons qu’un règlement puisse avoir lieu éventuellement, tant pour les victimes que pour notre diocèse», a indiqué dimanche l’abbé Martel.
Lundi matin, la porte-parole de l’archidiocèse de Québec a indiqué que, «sans commenter l’évolution du processus de l’action collective engagée, nous sommes entièrement en mode collaboration».
«Notre volonté est d’avancer vers un règlement», a réagi Valérie Roberge-Dion, l’attachée de presse du cardinal Gérald C. Lacroix. Mais elle n’a pas voulu confirmer la présence du cardinal et de l’évêque auxiliaire Marc Pelchat à la conférence de règlement à l’amiable.
Maintenant 134 victimes à Québec
En mars 2022, les négociations entre l’archidiocèse de Québec et les avocats des victimes de prêtres pédophiles ont été rompues. Neuf mois plus tôt, les parties avaient pourtant indiqué au juge Jacques Godbout de la Cour supérieure leur «volonté de discuter pour trouver un règlement hors cour».
«Je confirme que des négociations ont bien eu lieu dans ce dossier et qu’elles ont été rompues par l’archidiocèse», avait alors déploré Me Alain Arsenault, l’avocat qui représentait à ce moment 88 victimes.
Le 19 mai 2022, le recours collectif contre l’archidiocèse de Québec a été autorisé. Lors de l’audience tenue pour l’examen de cette demande en autorisation, les avocats des victimes ont déposé une liste de six pages qui annonçait que pas moins de 110 victimes les avaient contactés afin d’indiquer leur âge au moment de la première agression, les dates des agressions subies ainsi que les lieux où elles auraient été commises. Les noms des abuseurs allégués étaient masqués.
Le 16 août 2022, cette liste a été dévoilée de nouveau, cette fois avec les noms des présumés agresseurs. C’est là que le public a appris que le cardinal Marc Ouellet, l’ex-archevêque de Québec, était visé par des allégations d’inconduite sexuelle.
«Il y a maintenant 134 noms sur cette liste», a confirmé samedi Me Arsenault. Mais il n’a pas voulu, «pour l’instant», remettre cette nouvelle liste. «Je répète, pour l’instant», a-t-il répondu au journaliste de Présence.
Diocèse d’Amos
C’est le mardi 7 décembre 2021, au palais de justice d’Amos, que le cabinet Arsenault Dufresne Wee Avocats, dont fait partie Me Arsenault, a déposé une demande d’action collective contre le diocèse d’Amos.
On y indique qu’un homme identifié par les initiales A.B. et aujourd’hui âgé de 65 ans, révèle qu’entre 1963 et 1967, l’abbé Paul-Émile Bilodeau, qui enseignait la catéchèse à l’école Notre-Dame-de-Fatima de Val d’Or, l’aurait entraîné «dans une petite pièce située dans le couloir menant au gymnase de l’école, en prétextant vouloir le corriger ou le punir» et qu’il l’aurait plutôt agressé. Le prêtre aurait aussi ordonné à sa jeune victime «de ne pas crier, sans quoi il irait en enfer».
La victime alléguée réclame aujourd’hui une somme de 600 000 $ au diocèse d’Amos. Elle affirme avoir souffert toute sa vie des conséquences de ces agressions subies il y a près de six décennies.
Le 25 février 2022, un tableau anonymisé des victimes a été déposé. Cette liste indique que 29 personnes se sont déjà inscrites à ce recours, moins de trois mois après que le public en ait appris l’existence. Le nom de l’abbé Bilodeau apparaît cinq fois dans cette liste. Deux victimes mentionnent avoir été agressées à l’intérieur de la cathédrale d’Amos. La plupart des autres victimes indiquent que c’est au presbytère de leur paroisse que les abus auraient été commis.
Diocèse de Trois-Rivières
Le 21 juin 2022, la juge Claudia P. Prémont de la Cour supérieure a accordé l’autorisation d’exercer une action collective contre le diocèse trifluvien en raison d’agressions sexuelles commises de 1940 à nos jours.
Quinze mois plus tôt, lors d’une conférence de presse, l’animateur radiophonique Dominic Maurais révélait qu’à l’âge de 11 ans, l’aumônier du mouvement scout de sa paroisse, l’abbé Bernard Saint-Onge, lui a fait des attouchements sexuels. En 2012, ce prêtre a plaidé coupable à douze chefs d’attentat à la pudeur et a été condamné à six mois d’emprisonnement. Il est décédé le 23 juillet 2013.
Lors du jugement de juin 2022, M. Maurais a obtenu le statut de représentant de «toutes les personnes, de même que leurs héritiers et ayants droit, ayant été agressées sexuellement par un membre du clergé diocésain ou par un religieux, un membre du personnel laïc, un employé, un bénévole laïc ou religieux» sous la responsabilité du diocèse de Trois-Rivières au cours des huit dernières décennies.
Depuis, vingt-cinq victimes se sont inscrites à ce recours collectif, a indiqué le cabinet Arsenault Dufresne Wee Avocats. La plupart ont dénoncé des prêtres. Dans un cas, c’est le sacristain de la paroisse qui est identifié. Dans la colonne des lieux où les agressions auraient été commises, c’est le Séminaire Saint-Joseph de Trois-Rivières qui apparaît le plus souvent.
Quant au nom de l’abbé Saint-Onge, il est mentionné par plus du tiers des victimes. Les agressions auraient été commises au chalet du prêtre à Saint-Mathieu-du-Parc ou encore à sa résidence de Shawinigan.