Une entente de règlement est intervenue dans une action collective déposée, en décembre 2019, par des personnes mineures qui ont été agressées sexuellement par des membres ou des employés des Frères de Saint-Gabriel.
Cette entente prévoit que l’institut religieux va constituer un fonds de règlement d’un montant variant entre 9 405 000 $ et 26 895 000 $. «Le montant du fonds de règlement sera défini en fonction du nombre de réclamations acceptées par l’adjudicateur», explique l’avocat Justin Wee du cabinet Arsenault Dufresne Wee avocats.
Si 62 réclamations ou moins sont acceptées, ce fonds de règlement sera alors de 9,4 M$. Si l’adjudicateur – le juge responsable de recevoir et d’autoriser le versement des sommes aux victimes – accepte 100 réclamations, la communauté devra verser 16 M$. Dans le cas où les plaintes de 163 victimes seraient jugées recevables, la somme sera alors de près de 27 M$. Les honoraires des avocats des victimes représentent 25 % du fonds de règlement.
Victimes
Me Justin Wee confirme qu’au moment de la signature de l’entente de règlement, 62 victimes s’étaient inscrites à cette action collective. «Depuis l’annonce du règlement, on a déjà reçu cinq nouvelles inscriptions», dit-il. L’avocat fait remarquer que «ces personnes ne nous ont jamais contactés» jusqu’à ce jour. Sans doute, «ne voulaient-elles pas embarquer» avant d’être certaines de la conclusion de cette affaire. Elles ont donc préféré attendre qu’un règlement soit conclu avant de s’inscrire à cette action collective.
Le règlement précise que ce sont les personnes qui «ont été agressées sexuellement alors qu’elles étaient mineures» qui pourront soumettre une réclamation. L’agresseur est identifié comme «tout membre religieux des Frères de Saint-Gabriel, ainsi que tout bénévole ou employé» de l’institut. Les agressions auraient été commises entre «le 1er janvier 1940 et aujourd’hui» dans «tout établissement de formation, école, collège, établissement de loisir, centre d’animation, camp ou tout autre lieu situé au Québec».
Le cabinet d’avocats indique toutefois que «sont exclues les personnes qui ont signé en faveur des Frères de Saint-Gabriel une quittance individuelle en lien avec des prétentions d’agression sexuelle ou dans le cadre du Programme national de réconciliation avec les orphelins et orphelines de Duplessis».
Les termes de cette entente de règlement sont consignés dans un document qui compte 15 pages.
Le frère André Roberge, qui a déjà été économe général, à Rome, des Frères de Saint-Gabriel, a signé l’entente de règlement au nom de son institut. L’entente doit encore obtenir l’approbation de la Cour supérieure. Une audition est prévue à cet effet le 28 septembre au Palais de justice de Montréal.
Archives communautaires
Un élément de cette entente de règlement n’apparaît pas dans les autres ententes qui ont été conclues avec des institutions religieuses québécoises ces derniers mois.
Une visite du Service des archives des Frères de Saint-Gabriel doit avoir lieu après l’approbation de l’entente. Les «dossiers de trois personnes mentionnées» dans l’action collective «pourront être consultés» à ce moment.
De plus, on y précise que «des vérifications factuelles seront effectuées dans les archives» des Frères de Saint-Gabriel, afin de vérifier «la fréquentation par le réclamant du lieu dans lequel les gestes à caractère sexuel auraient été commis et la présence, à l’époque alléguée, de l’auteur allégué de ces actes».
Pas de commentaires
Les Frères de Saint-Gabriel ont refusé de commenter l’entente intervenue avec les avocats des victimes. «Pas de commentaires», s’est bornée à indiquer une représentante du secrétariat provincial qui n’a pas voulu s’identifier.
En décembre 2020, le frère René Delorme, alors responsable provincial des Frères de Saint-Gabriel, n’avait pas répondu aux questions de Présence lorsque l’action collective avait été autorisée. L’institut n’a pas voulu indiquer si frère Delorme est toujours son supérieur provincial. On n’a pas répondu non plus à notre question sur le nombre de frères que compte aujourd’hui l’institut.
Les Frères de Saint-Gabriel sont présents au Québec depuis 1888.
Lettre d’excuses
L’entente de règlement prévoit aussi que les victimes dont la réclamation sera jugée admissible recevront, en même temps qu’un chèque, une lettre d’excuses personnalisée.
Cette lettre stipulera que l’adjudicateur – il s’agit de Jacques R. Fournier, juge en chef retraité de la Cour supérieure du Québec – a «conclu que des agressions sexuelles ont été commises au Québec à votre égard» par un religieux membre ou un employé laïc des Frères de Saint-Gabriel.
«Nous sommes conscients que cette somme d’argent ne pourra jamais faire disparaître toute la souffrance que vous avez subie. Nous vous demandons de nous pardonner pour les gestes commis. Recevez nos excuses sincères», écrira-t-on aussi dans cette lettre.