Une religieuse française «n’a d’autre choix que d’assigner en justice» le cardinal québécois Marc Ouellet, l’ex-préfet du dicastère pour les évêques, vient de faire savoir l’avocate de mère Marie Ferréol.
Renvoyée pour «mauvais esprit» de sa communauté de Pontcallec, en Bretagne, par le cardinal Ouellet le 21 octobre 2020, d’abord pour une période de trois ans puis indéfiniment, cette religieuse des Dominicaines du Saint-Esprit «n’a jamais su les faits dont elle aurait été coupable, en dépit de ses demandes répétées et de celles de son avocate».
C’est le pape François qui, en 2020, a confié au cardinal Ouellet la conduite d’une «visite apostolique» auprès de cette congrégation traditionaliste. En décembre 2021, le pape a remis une lettre aux Dominicaines expliquant que cette visite (ou enquête) «a permis de faire la lumière sur des difficultés du passé mais aussi de proposer et commencer la mise en œuvre des solutions». Une des décisions du cardinal Ouellet aura précisément été le renvoi définitif de mère Marie Ferréol.
Mais «indépendamment de l’absence de juste motif connu à ce jour», estime Me Adeline le Gouvello, l’avocate qui représente la religieuse, «ce renvoi a été fait au mépris des règles de base applicables à toute sanction, le respect du contradictoire et des droits à se défendre».
L’expulsion de mère Marie Ferréol – de son vrai nom Sabine Baudin de la Valette – après 34 ans au sein de sa communauté aurait été accompagné de «conditions particulièrement dures et vexatoires».
«Outre la perte de sa vie au sein de sa communauté, ce qui lui était le plus cher», la religieuse est dorénavant confrontée à des difficultés matérielles, indique son avocate. Elle n’a pas droit aux indemnités de chômage et ne peut percevoir le Revenu de solidarité active (RSA, le programme français d’aide sociale). Elle est actuellement «sans emploi ni logement» et vit «de la charité d’autrui».
Me le Gouvello déplore que «ni les artisans de son renvoi ni sa communauté ne se sont préoccupés de savoir comment elle pourrait vivre».
«Cette dureté s’inscrit dans le prolongement de la décision de renvoi qui n’avait laissé aucune place à la discussion, la défense, la clarté, la vérité.»
Une audience au Tribunal judiciaire de Lorient est déjà prévue. Elle se tiendra le 4 octobre 2023. Pour l’avocate, ce sera enfin «l’occasion d’avoir des réponses et de faire la vérité sur cette affaire».
«Elle devrait en outre contribuer à une meilleure justice, pour que des hommes et femmes d’Église respectent mieux à l’avenir les règles de droit, tant civiles que canoniques».
Pour Me Adeline le Gouvello, «il n’est pas concevable que l’on puisse se débarrasser des personnes arbitrairement et sans en assumer les conséquences matérielles».
Réaction du cardinal
Depuis janvier 2023, le cardinal Marc Ouellet a fait parvenir aux médias québécois trois déclarations officielles dans lesquelles il réfute les allégations d’inconduite sexuelle déposées par au moins quatre femmes qui l’ont connu alors qu’il était supérieur du Grand séminaire de Montréal ou encore archevêque de Québec. L’ex-archevêque de Québec poursuit actuellement en diffamation l’agente de pastorale Paméla Groleau qui a remis au pape François, à l’invitation même de l’actuel archevêque de Québec, le cardinal Gérald Lacroix, une lettre détaillant les gestes et propos inappropriés qu’aurait eus à son endroit son prédécesseur, alors qu’il était son employeur en 2008.
Le cardinal Ouellet, 79 ans, n’a pas acheminé aux médias d’ici sa réaction à sa toute récente assignation à comparaitre en France.