Une dirigeante nationale et même internationale, durant plus de six décennies, de la Jeunesse ouvrière catholique (JOC) et du Mouvement des travailleuses et travailleurs chrétiens (MTC), Bernadette Dubuc (née Dionne) est décédée le mercredi 26 avril 2023 à Québec. Elle était âgée de 84 ans.
Bernadette Dubuc (elle est connue sous ce nom depuis son mariage avec Yvon Dubuc) aura été active jusqu’à son dernier souffle, confie Louise Paré, l’actuelle coordonnatrice nationale du MTC.
«Elle a été l’une de mes mentors en Action catholique, dit-elle, toujours attentive à transmettre aux plus jeunes l’histoire des mouvements. Et pas seulement aux gens d’ici, au Québec. Elle a travaillé à l’expansion de la JOC et du MTC durant plusieurs années», ajoute-t-elle, rappelant qu’elle a été secrétaire générale de 1998 à 2002 du Mouvement mondial des travailleurs chrétiens (MMTC).
Louise Paré raconte qu’elle a reçu un coup de fil de sa mentore pas plus tard que la semaine dernière, «tout juste avant qu’elle n’entre à l’hôpital». Bernadette Dubuc voulait la féliciter d’avoir accepté récemment la responsabilité de conseillère pour les Amériques auprès de MMTC. «Je sais que tu en as plein les bras, mais c’est très bien que tu aies accepté ce mandat», lui a-t-elle dit. «C’est du Bernadette, ça.»
«Cette femme pouvait soulever des montagnes. C’était une femme de convictions et de foi enracinée», dit encore Louise Paré.
Pour la suite du monde
Quelques jours avant son décès, elle a même convoqué ses proches collaborateurs, dans sa chambre d’hôpital pour une ultime réunion. «Elle fermait ses dossiers comme quelqu’un qui va partir à la retraite», raconte Yves Carrier, secrétaire du Carrefour Cardijn (du nom du fondateur de la JOC, l’abbé Joseph Cardijn). Bernadette Dubuc était la présidente depuis 2004 de cette maison de Québec où ont logé et logent toujours les différents mouvements d’Action catholique ainsi que des groupes communautaires.
Lors de cette réunion, elle a remis «ses mandats, ses recommandations et ses responsabilités», dit Yves Carrier. «Sereine, elle ne m’a exprimé aucun regret, ni aucune peine, concernant son propre sort. Comme à son habitude, elle s’en faisait pour les autres et pour la suite du monde.»
Paul-Yvon Blanchette a lui aussi participé à cette rencontre de travail avec Bernadette Dubuc. «Elle nous a remis des clés, des carnets de chèques et des recommandations pour les prochains travaux à effectuer au 435, du Roi, le Carrefour Cardijn». Ce militant, qui a dirigé la publication du livre Foi chrétienne et engagement social – Solidarité et espérance à Québec (Le promeneur des ondées, 2022), souligne que Bernadette Dubuc aura été l’âme dirigeante de cette résidence, le Carrefour Cardijn, un bâtiment autrefois la propriété de l’archidiocèse de Québec.
Second baptême
En octobre 1965, Bernadette Dionne publie un long texte où elle résume son expérience jociste. «La JOC est pour moi un second baptême, c’est-à-dire une entrée adulte dans l’Église, une redécouverte», écrit-elle dans Prêtre aujourd’hui, une revue au service des prêtres engagés en Action catholique ou encore dans les quartiers populaires et les syndicats.
En 1957, raconte encore la jeune militante, la JOC mène une enquête sur les conditions de vie des adolescentes de sa paroisse. On y révèle que la plupart des jeunes filles ne vont plus à l’école et occupent déjà des emplois précaires. Issue «d’une famille ouvrière nombreuse et assez pauvre», Bernadette Dionne prend alors la décision de se consacrer entièrement «au service du monde ouvrier».
Devenue présidente nationale de la JOCF (la section féminine de la JOC), elle rencontre en 1960 le ministre du Travail Michael Starr afin d’obtenir qu’Ottawa accorde «des prestations d’assurance-chômage aux jeunes travailleurs qui veulent apprendre un métier ou suivre des cours de perfectionnement technique».
Paul-Yvon Blanchette rappelle aussi qu’au milieu des années 1960, Mgr Joseph Cardijn a fait appel aux jocistes du monde entier afin qu’une équipe chargée de faire connaître la JOC en Algérie soit constituée. «Bernadette a spontanément levé la main. Elle a passé plusieurs années en Afrique», dit-il. C’est là qu’elle a rencontré le coopérant et agronome Yvon Dubuc qu’elle épousera en 1972.
À son retour du continent africain, elle participe à la coordination nationale des différents mouvements d’Action catholique. Entre 1998 et 2002, elle sera à Bruxelles auprès du MMTC. Elle a été membre de la Fondation de la JOC et a participé, en novembre 2022, à l’assemblée qui a entériné la dissolution de la JOC.
Les funérailles de Bernadette Dubuc se tiendront le samedi 3 juin 2023 à l’église Saint-Mathieu de Québec, a annoncé sa famille.