«Ce n’est rien de moins qu’un miracle», répète Paul Bouthillier, le président de la fabrique de la paroisse Sainte-Madeleine d’Outremont, à chacun des visiteurs venus dimanche le 7 mai pour admirer trois très grands tableaux de Guido Nincheri.
Recouvertes de peinture durant six décennies, ces œuvres réalisées au début des années 1930 ont été restaurées ce printemps grâce aux dons récoltés auprès de paroissiens, d’amoureux du patrimoine religieux, de la communauté italienne et de mécènes.
«Pas un sou des gouvernements ici, seulement des contributions du public, un miracle», précise le président de la fabrique.
«Le coût de construction de cette église a été de 260 000 $», rappelle alors Hubert Sacy, coordonnateur de la campagne de financement instituée pour faire revivre les œuvres de Nincheri. «Pour mettre à jour trois peintures, ça nous a coûté 175 000 $.»
Mais les efforts des bénévoles ont été récompensés. Le résultat de la restauration des murs du transept nord-ouest de l’église a visiblement conquis les visiteurs venus admirer ces œuvres, peu après la messe dominicale. Ils ont pu longuement admirer La résurrection de Lazare et Jésus chez Marthe et Marie dans la région du Jourdain, de grandes peintures aux couleurs vives et aux multiples détails. À leur droite, on a aussi dévoilé deux saints martyrs canadiens, les jésuites Antoine Daniel et Noël Chabanel. Les six autres martyrs, dont Jean de Brébeuf et Gabriel Lalemant, sont toujours recouverts de peinture dans les transepts de gauche et de droite.
«En recouvrant ces tableaux de peinture à l’eau, cela a eu malgré tout un effet bénéfique», reconnaît aujourd’hui Hubert Sacy. Ils ont été protégés, durant soixante ans, de la fumée des bougies, des lampions et de l’encens. «Le résultat, c’est qu’on a des couleurs éclatantes.»
Prêtre-administrateur de la paroisse Sainte-Madeleine, le père Nicolas Matias Sengson, lui-même un musicien, un iconographe et un spécialiste de la liturgie, comprend lui aussi difficilement qu’au nom du renouveau liturgique, on ait osé recouvrir de peinture blanche chacun des murs, des plafonds et des colonnes de l’église, tous peints et décorés par cet artiste qu’on a surnommé le Michel-Ange de Montréal.
«Comment ont-ils pu avoir le culot de tout recouvrir?», lance-t-il en promenant son regard vers chacun des murs de l’église Sainte-Madeleine. «Ils devaient avoir une raison noble pour faire cela», espère-t-il. «Après tout, ce n’étaient pas des méchants.»
Le religieux regrette surtout que les ouvriers responsables de peinturer l’église dans les années 1960 ont caché aux paroissiens non seulement de grandioses œuvres d’art mais aussi de véritables catéchèses qu’il faut mettre en lumière.
«Pour moi, l’expression de foi inclut la recherche, le cheminement et la découverte. Ici, ce projet de restauration nous incite à faire la recherche, à découvrir et à dévoiler un trésor», dit-il. «À l’heure des médias, de la vidéographie et des réseaux sociaux, le dévoilement devient un projet de foi.»

Hubert Sacy voudrait bien dévoiler neufs autres œuvres de Guido Nincheri dans cette église d’Outremont. Il estime le coût de ces travaux à 600 000 $.
Dès l’automne, promet-il, il cherchera à amasser cette somme en faisant de nouveau appel à la générosité du public.