Installée sur la terrasse de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, une monumentale sculpture de l’artiste Timothy Schmalz rend hommage aux enfants, aux femmes et aux hommes d’origines et d’époques différentes qui ont un jour quitté leur pays à la recherche d’un autre qui accepte de les accueillir.
L’œuvre intitulée Angels Unawares, dévoilée au début du mois de novembre 2022, est une sculpture de bronze pesant 3,5 tonnes. Elle montre une barque de six mètres de long sur laquelle s’entassent, debout, pas moins de 140 enfants, femmes et hommes, certains une valise à la main, d’autres la terreur dans leurs yeux.
«Cette œuvre d’art reflète la situation dans laquelle vivent chaque jour des milliers de personnes dans le monde dans leur parcours d’immigrant ou de réfugié. Elles ont quitté leur patrie pour diverses raisons et toutes recherchent une vie nouvelle et meilleure». Toutes sont en quête d’une «promesse d’espoir, de paix et de sécurité», a déclaré Michael DeLaney, le recteur de l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, lors du dévoilement de la sculpture.
Cette sculpture est identique à celle qu’a réalisée Timothy Schmalz et qui a été installée place Saint-Pierre, au Vatican. C’est le pape François lui-même qui l’a inaugurée le 29 septembre 2019 lors de la la Journée mondiale du migrant et du réfugié. Angels Unawares a été prêtée à l’Oratoire pour une année. Elle sera ensuite installée de manière permanente à Toronto.
Pour le père DeLaney, les visiteurs qui se rendront à l’Oratoire Saint-Joseph et qui découvriront un à un les visages de la sculpture ne pourront que «réfléchir à la situation actuelle des immigrants et des réfugiés». Il souhaite surtout que «notre communauté et notre Église accueillent et célèbrent» chaque individu «quel que soit son pays, sa langue, son sexe, son origine ethnique, culturelle ou religieuse».
«Que tous et toutes soient invités et accueillis ici», a dit le recteur de l’Oratoire.
Une commande du cardinal Czerny
«Nous avons dû attendre un long moment avant que cette sculpture ne soit installée ici», a révélé le sculpteur Timothy Schmalz lors du dévoilement de son œuvre. La pandémie a retardé son arrivée à Montréal.
«Mais je ne pouvais espérer un lieu plus symbolique pour voir cette barque finalement accoster ici, à l’Oratoire Saint-Joseph», a-t-il lancé. L’artiste, qui vit en Ontario, estime que l’Oratoire est le «Vatican canadien».
«C’est donc logique d’avoir à Montréal une copie identique à celle de la place Saint-Pierre», a-t-il déclaré.
Mais il y a aussi une autre raison pour laquelle il tenait tant à ce que sa sculpture puisse être admirée à Montréal. Timothy Schmalz a expliqué que c’est le cardinal Michael Czerny, dont la famille a émigré au Canada alors qu’il était âgé de deux ans et qui a étudié dans une école jésuite à Montréal, qui lui a demandé de préparer une œuvre sur le thème de l’immigration, une sculpture qui rendrait hommage aux réfugiés.
«C’est de retour au Canada que l’idée m’est venue. J’imaginais une foule de réfugiés, de migrants et d’immigrants, venant de tous les coins du monde, de tous moments de l’histoire, coincés sur une seule barque. Au centre, il y a un ange. Mais en raison de la foule, on ne voit que ses ailes.»
Seul, dans son studio, il venait d’esquisser, dit-il, «une traduction visuelle» de ce qu’il estime être «un des plus beaux passages de la Bible».
Il cite alors ce verset de la Lettre aux Hébreux: «N’oubliez pas de pratiquer l’hospitalité. En effet, en la pratiquant certains ont accueilli des anges sans le savoir».
Il y a bien 140 personnages sur cette barque – dont les parents du cardinal Michael Czerny, à l’arrière. Mais c’est «toute notre humanité qui est rassemblée sur un seul bateau», dit-il.
Il croit que chaque personne qui se rendra à l’Oratoire se reconnaîtra dans l’un ou l’autre des personnages qu’il a sculptés. Sinon, «ce sont peut-être leurs parents ou leurs grands-parents qu’ils reconnaîtront». Il les invite aussi à bien examiner les émotions, parfois de l’espoir, parfois de la frayeur, qu’il a pris soin de graver sur leurs visages.
Timothy Schmalz est bien conscient que «certaines personnes n’aiment pas beaucoup l’idée d’aider les immigrants et les réfugiés» ou encore celle de les accueillir à bras ouverts. «Mais, si nous ne les aidons pas, nous contribuons à leur mort», dit-il.
«Mais si vous êtes un chrétien, c’est votre responsabilité», lance-t-il.