L’évêque Jean-Pierre Blais est-il toujours en poste à Baie-Comeau?
Ces jours-ci, quiconque lance cette simple question à des représentants de l’Église catholique au Canada risque d’obtenir une réponse louvoyante ou même un rébarbatif «pas de commentaires».
Cette question est pourtant légitime de la part des médias d’autant plus que le 2 décembre 2022, le Service des communications du diocèse de Baie-Comeau annonçait que Mgr Blais pourrait bien «être relevé de ses fonctions».
Cette possibilité découle du fait que la veille, le 1er décembre, le public – tout comme l’évêque de Baie-Comeau lui-même – apprenait avec stupéfaction que le nom de Jean-Pierre Blais était inséré dans un tableau préparé par le cabinet Arsenault Dufresne Wee Avocats dans le cadre de l’action collective menée contre l’archidiocèse de Québec. Les faits qui lui sont reprochés seraient survenus, il y a un demi-siècle, au presbytère de Charny, alors qu’il était un tout jeune prêtre.
Rappelons ici que les faits allégués n’ont toujours pas subi l’épreuve des tribunaux, que Mgr Blais jouit comme tout citoyen de la présomption d’innocence et qu’il a immédiatement et formellement nié toute inconduite sexuelle.
Le Vatican rapidement informé
Dans l’Église catholique, dès que des allégations de tels délits sont formulées contre des évêques, des archevêques ou des cardinaux, le Vatican exige d’en être informé. C’est l’archevêque de Rimouski, Mgr Denis Grondin, qui s’est chargé d’avertir Rome, et plus précisément le dicastère pour les évêques, dirigé par le cardinal Marc Ouellet, l’ex-archevêque de Québec.
Selon le motu proprio Vos estis lux mundi promulgué par le pape François en 2019, les autorités vaticanes disposent ensuite d’un délai de trente jours pour fournir à l’archevêque métropolitain – dans ce cas Mgr Grondin – «les instructions nécessaires sur la manière de procéder dans le cas concret».
Enjeux de gouvernance et de transparence
La question de départ demeure pertinente. Mgr Blais a-t-il été relevé de ses fonctions? Ou est-il toujours en poste?
Chaque jour, le service de presse du Vatican publie une note appelée Renonciations et nominations (Rinunce e nomine) où apparaissent à midi pile les noms des nouveaux évêques ainsi que les noms de ceux dont la démission a été acceptée. En décembre et jusqu’à ce jour, le nom de l’évêque de Baie-Comeau n’est jamais apparu dans ce bulletin.
Comme le Vatican n’a toujours pas rendu publiques ses «instructions» sur la gouvernance du diocèse de Baie-Comeau, Présence a souhaité s’entretenir directement avec Mgr Blais. La demande d’entrevue a été ignorée.
Le journaliste a donc soumis ses questions au Service diocésain des communications. Mgr Blais est-il toujours en poste? A-t-il présidé la messe de Noël? Si oui, dans quelle paroisse? Va-t-il présider des confirmations durant le premier trimestre de l’année 2023? Participera-t-il aux rencontres prochaines de la Conférence des évêques catholiques du Canada ou de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec?
«Tel que nous l’avons mentionné précédemment, nous ne ferons pas de commentaire sur ce sujet», lui a-t-on répondu.
Demande à l’archevêque
Sans réponse détaillée du diocèse, Présence s’est adressé à l’archevêque de Rimouski, Mgr Denis Grondin, qui dirige la province ecclésiastique dont fait partie Baie-Comeau.
«Avez-vous reçu les instructions de Rome? Si oui, ont-elles été signifiées à Mgr Blais? Seront-elles annoncées aux fidèles? Quand?»
La réponse épiscopale est parvenue en moins de dix minutes.
«Comme il a été mentionné précédemment, le travail de Mgr Grondin est complété dans ce dossier et le diocèse de Rimouski n’émettra aucun commentaire à ce propos», a indiqué le porte-parole de l’archevêque.
En ce début d’année 2023, personne ne peut donc affirmer catégoriquement que l’évêque Jean-Pierre Blais est toujours en poste à Baie-Comeau et qu’il conserve toutes ses responsabilités épiscopales malgré le fait que son nom soit mentionné dans une action collective.
Réponse de la conférence épiscopale
Le mercredi 11 janvier, Jean Vézina, le secrétaire général de la Conférence des évêques catholiques du Canada, a accepté de répondre aux questions de Présence.
«La CECC n’est pas au courant d’un quelconque changement dans le statut de Mgr Blais comme Ordinaire de Baie-Comeau», a-t-il indiqué.
L’abbé Vézina a terminé son courriel en conseillant d’«adresser toutes [ces] questions à l’évêque métropolitain de la province ecclésiastique où Mgr Blais est domicilié», soit à l’archevêque Denis Grondin.
«C’est déjà fait», a aussitôt répondu le journaliste, en poussant un long soupir.