Les membres bénévoles de Développement et Paix estiment que l’enquête sur l’adhésion des partenaires de l’organisme à l’enseignement moral et social de l’Église catholique a eu un impact négatif sur le travail de solidarité qu’ils accomplissent. C’est la première fois depuis le début de cette affaire que des documents font aussi clairement état de cette grogne interne.
De plus, des groupes que l’organisme de solidarité internationale a financés au cours des cinq dernières années, disent avoir été blessés et même humiliés par cette enquête menée conjointement par les évêques canadiens et la direction de Développement et Paix.
Un sondage ainsi que des consultations menées auprès de membres et de partenaires de Développement et Paix, et dont les résultats viennent d’être rendus publics, révèlent que le mouvement exprime un vif mécontentement envers cette «revue des partenaires» qui a duré trois années.
Les membres ont même manifesté «de la colère, de la peine, de la déception et du doute» lorsque les résultats de cette évaluation des partenaires ont été publiés en février 2021. Ils se demandent aujourd’hui si «les valeurs de l’organisation sont [toujours] intactes».
Cette enquête sur les partenaires de Développement et Paix a été perçue «comme une ingérence de l’Église dans le fonctionnement de Développement et Paix».
Les membres critiquent aussi la direction de l’organisme «pour avoir utilisé un haut niveau de confidentialité, non seulement quant aux partenaires impliqués, mais aussi quant à la méthode d’investigation, les critères utilisés, et les résultats de l’examen des partenaires».
Des partenaires blessés
Ces critiques sont contenues dans un document de travail qu’ont reçu les 150 participants à l’Assemblée d’orientation de Développement et Paix, un événement qui débute le 16 juin à l’Université Dalhousie de Nouvelle-Écosse. La dernière rencontre de ce type s’est déroulée en 2015.
Le résumé des consultations menées ces derniers mois a été déposé dans un document de 35 pages.
On y révèle aussi que le tiers des partenaires qui ont répondu estiment que cette évaluation marquait «une rupture avec la mission de Développement et Paix et les relations historiques qu’ils avaient établies» ensemble, au fil des années.
Plusieurs répondants «croient que Développement et Paix a exclu des partenaires sans processus clair et sans possibilité de dialogue».
Même lorsqu’ils ont répondu à toutes les questions posées par Développement et Paix ou par la Conférence des évêques catholiques du Canada, «ces réponses ont été ignorées sans explication», déplorent les partenaires consultés.
«Ce qui nous a le plus surpris (après les premières accusations et notre réponse), c’est le silence de Développement et Paix. Accusations, puis silence radio», déclare un partenaire. Le document ne mentionne pas les noms des groupes du Sud qui ont participé aux consultations menées avant l’Assemblée d’orientation.
«Les accusations portées dans la revue des partenaires étaient vraiment horribles», dit un autre partenaire qui exprime son incompréhension et sa colère à l’idée «qu’une Église et des autorités ecclésiastiques d’un autre pays vous accusent sans connaître les véritables défis de la vie quotidienne, de la vie des femmes ou du travail des organisations».
Un partenaire a tenu à saluer «le courage des femmes qui, après avoir reçu des accusations injustes, les ont dénoncées» dans leur propre communauté.
Enfin, un organisme révèle qu’il a même «reçu des excuses de son nouvel évêque pour le manque de soutien de son prédécesseur». Rappelons que les évêques canadiens ont demandé à leurs collègues des pays du Sud de leur remettre des lettres d’appui pour chacun des groupes, présents dans leurs diocèses, qui sont financés par Développement et Paix.
Des membres de l’organisme en provenance de tout le Canada sont attendus à l’Assemblée d’orientation de Développement et Paix, tout comme des employés, des évêques et des partenaires. Le cardinal canadien Michael Czerny, actuel préfet du dicastère pour le Service du Développement humain intégral, sera présent à Halifax et prononcera une conférence vendredi.
L’Assemblée d’orientation est un forum d’échange et de réflexion sur la direction générale et les thèmes programmatiques de l’organisme pour les cinq années à venir, explique Développement et Paix.