La Société canadienne d’histoire de l’Église catholique (SCHEC) mettra en lumière «les œuvres des institutions des communautés religieuses catholiques» à la faveur de son 89e congrès, qui se tiendra du 22 au 23 septembre, à l’Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick. L’événement s’annonce dans un contexte de défis majeurs pour l’Église.
«On voulait valoriser le regard sur les particularités du développement de l’Église catholique dans les Maritimes», indique Dominique Laperle, historien des congrégations religieuses et vice-président de la SCHEC. La centaine de personnes attendues à l’événement auront à faire ressortir la contribution de l’église ainsi que celle des communautés religieuses au développement de la société québécoise et canadienne ou des Maritimes.
Des soins de santé, le service social auprès des personnes âgées ou des orphelins et des écoles sont présentés par M. Laperle comme des œuvres provenant des communautés religieuses. Ces dernières s’étaient déployées au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse «dans un contexte où le droit scolaire n’était pas garanti par les gouvernements provinciaux.»
Le congrès s’articulera autour des sujets tels que le rôle des congrégations religieuses dans l’édification des instances d’éducation supérieure, l’écriture de l’histoire religieuse acadienne, le militantisme linguistique féminin en Acadie et la mission des religieuses Hospitalières au Nouveau-Brunswick. Les participants se pencheront aussi sur l’œuvre des Filles de la Croix dans la Prairie, des Sœurs du Bon-Pasteur de Québec, des Sœurs grises de Montréal et des Sœurs blanches à Antigonish.
«C’est intéressant parce que les Sœurs blanches sont associées plus facilement à des missions africaines comme les Pères blancs. Or, là on voit qu’elles ont une mission dans une région de la Nouvelle-Écosse», a commenté l’historien. Les thèmes porteront également sur d’autres pays tels que le Gabon, l’Indochine française et la Birmanie britannique. Le but est de permettre de faire des comparaisons et d’avoir un regard croisé.
Parent pauvre de la recherche
Ce 89e congrès est l’occasion pour Présence d’interroger les organisateurs sur la situation de la recherche sur les communautés religieuses au Canada.
M. Laperle réalise qu’il y a de moins en moins de spécialistes de l’histoire religieuse ou des sciences religieuses au Québec et dans la francophonie canadienne. «Du côté anglophone, la situation est un peu différente. Mais du côté francophone, à chaque fois qu’un professeur spécialisé s’en va, on ne le remplace pas», déplore l’universitaire. Il prend notamment le cas de l’Université Laval et de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
Même s’il reconnaît qu’il y a des gens compétents, surtout à l’Université de Montréal, à l’Université du Québec à Montréal ainsi qu’à la Faculté de théologie et sciences religieuses de l’Université Laval, le vice-président de la SCHEC répète que le nombre de spécialistes dans le domaine se réduit.
Patrimoine en péril
L’avenir du patrimoine religieux fait également l’objet de préoccupations compte tenu du vieillissement des communautés religieuses et de l’accélération de la vente de leurs maisons. «Les Sœurs grises sont, comme la majorité des congrégations apostoliques, vieillissantes et n’ont pas de recrutement. Elles ont vendu, il y a quelques années, la maison mère historique dans le centre-ville de Montréal, qui est désormais le pavillon de l’Université Concordia», rappelle M. Laperle.
En juin dernier, la Congrégation de Notre-Dame a mis en vente le domaine Villa-Maria, qui lui appartient depuis 1854. Le site comprend, entre autres, une résidence, une infirmerie, un centre administratif et deux collèges.
«Au cours des dernières années, nous avons travaillé très fort pour essayer de trouver des solutions permettant aux sœurs de continuer à habiter ce domaine auquel elles sont très attachées et dont nous sommes propriétaires depuis 189 ans. Cela n’a malheureusement pas été possible pour des raisons hors de notre contrôle», s’est désolée sœur Ona Bessette, supérieure générale des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame.
Elle a évoqué une grande tristesse et a poursuivi en ces termes : «Aujourd’hui, la gestion du domaine s’avère beaucoup trop lourde pour une communauté dont la moyenne d’âge est de plus de 86 ans. Nous devons donc tourner cette page d’histoire, mais nous souhaitons le faire en respect de notre mission éducative et de tous nos partenaires.»
Archives religieuses
Cette situation amène certains chercheurs à se questionner sérieusement sur le patrimoine archivistique religieux et son avenir. M. Laperle se félicite toutefois des différentes initiatives prises dans le cadre de la préservation et de la conservation des archives. Les documents d’une vingtaine de communautés religieuses seront regroupés sur la Rive-Sud de Montréal, à Longueuil.
«Ça va permettre de préserver au Québec une partie des archives parce que toutes les congrégations religieuses de rite romain peuvent les retourner carrément dans les archives à Rome. On perdrait une partie de ce patrimoine», explique l’universitaire.
D’autres communautés ont fait des dons, à l’image de la communauté des Sœurs de Sainte-Anne. Fondée en 1850 à Vaudreuil, elle a donné son fonds d’archives au Centre d’archives de Vaudreuil-Soulanges. Il s’agit de plus de 400 mètres linéaires de documents constitués de textes manuscrits et imprimés, de photographies, d’affiches, de plans et de dessins.
Des préoccupations sur le sort des archives religieuses pourraient être abordées au cours des exposés sur les thèmes de la mémoire et religion et la constitution de nouvelles archives à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec.