Le 20 décembre 2021, pour une deuxième fois de sa vie, Phil Fontaine rencontrera, lors d’une audience privée, le chef de l’Église catholique.
«Je suis très honoré d’avoir, de nouveau, été choisi», a lancé, le jeudi 25 novembre 2021, ce membre de la Première Nation de Sagkeeng et le représentant du Manitoba lors d’une conférence de presse organisée par l’Assemblée des Premières Nations afin de dévoiler les noms et les titres des 13 délégués qui se rendront au Vatican rencontrer le pape François.
Le 25 avril 2009, alors qu’il était alors le chef national de l’Assemblée des Premières Nations, Phil Fontaine a rencontré le pape Benoît XVI afin de discuter des pensionnats autochtones administrés par l’Église catholique et des violences exercées contre les enfants qui y ont séjourné.
«Nous n’avons pas réussi, en 2009, à obtenir des excuses» du pape, a-t-il rappelé. «Des regrets profonds, oui. Mais pas des excuses. À cette époque, il n’y avait pas encore de rapport final de la Commission de vérité et réconciliation (CVR), pas d’appels à l’action, pas de tombes anonymes», a-t-il expliqué.
Un engagement
Phil Fontaine espère qu’au terme de l’audience de 60 minutes à laquelle il participera le 20 décembre 2021, le pape François prendra l’engagement de «prononcer des excuses, sur le territoire des Premières Nations, lorsqu’il viendra au Canada». Sans quoi, a-t-il déclaré à titre personnel, ce voyage au Vatican sera une «terrible perte de temps».
Le 27 octobre 2021, le service de presse du Vatican a fait savoir que le pape François venait d’accepter une invitation officielle, reçue deux semaines plus tôt, à «faire un voyage apostolique au Canada, dans le contexte du processus pastoral de longue date de réconciliation avec les peuples autochtones». Plusieurs observateurs estiment probable que ce périple ait lieu le 30 septembre 2022, lors de la seconde Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.
Les 13 délégués des Premières Nations, ainsi que leur conseiller spirituel Fred Kelly, partiront pour Rome le 14 décembre 2021. La cheffe Roseanne Casimir, de la Première Nation Tk’emlúps te Secwépemc, fera partie de cette délégation. Elle a dit souhaiter que le pape vienne «entendre la vérité» à Kamloops, près de cet ancien pensionnat autochtone de Colombie-Britannique où ont été découverts cet été les restes de 215 enfants.
Huit délégués du Ralliement national des Métis sont attendus au Vatican du 14 au 20 décembre. Quant à la délégation de l’Inuit Tapiriit Kanatami, elle comprendra sept membres, a-t-on aussi appris jeudi. Les frais de voyage de ces 28 délégués sont payés par la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC). De plus, quatre évêques canadiens, dont Mgr Raymond Poisson, le président de la CECC, participeront aux audiences qu’auront les trois délégations avec le pape François.
« Frappez et on vous ouvrira »
C’est le Déné Norman Yakeleya, le chef régional pour les Territoires du Nord-Ouest, qui dirigera la délégation de l’Assemblée des Premières Nations. Un survivant des pensionnats autochtones, le chef Yakeleya a dit avoir retenu quelques passages bibliques durant ses cours de religion.
«Je ne suis pas un spécialiste de la Bible», s’est-il empressé de reconnaître, avant de citer par cœur, ce verset de l’évangile de Matthieu: «Demandez et on vous donnera; cherchez et vous trouverez; frappez et l’on vous ouvrira.»
Ce verset, dont il a aussi donné la référence exacte (Matthieu 7, 7), l’accompagne depuis qu’il planifie cette prochaine rencontre avec le pape.
«Depuis tant d’années, nous demandons des excuses. Depuis toutes ces années, nous cherchons le respect, la justice et la réconciliation.» En décembre, a-t-il ajouté, les représentants des Premières Nations du Canada iront «frapper aux portes du Vatican». Et le chef Yakeleya se dit convaincu que «les portes s’ouvriront».
Mais «seul Dieu sait ce que le pape François nous répondra», a-t-il déclaré. Depuis, il «prie Dieu pour que le pape prononce les bons mots».
«Bien que les excuses soient si importantes, il est également important de réfléchir à ce qui se passe dans un monde post-excuses», a ajouté le chef Yakeleya, fier d’indiquer que deux jeunes délégués rencontreront le pape François. «Cette rencontre est l’occasion de façonner l’avenir de nos enfants et de leurs enfants.»