Neuf ans après son entrée en fonction, le pape François a promulgué la constitution apostolique réformant la Curie romaine, un projet qu’il avait entamé avec son internationalisation du Collège des cardinaux peu après son entrée en fonction en 2013.
Par Cindy Wooden
Praedicate Evangelium (Prêchez l’Évangile), qui a été publiée uniquement en italien par le Vatican le 19 mars, entrera en vigueur le 5 juin, jour de la fête de la Pentecôte.
En fusionnant certaines congrégations et certains conseils pontificaux et en rehaussant le statut d’autres – en particulier le bureau caritatif de l’aumônier papal – le pape François a dit espérer que la constitution garantirait que les bureaux du Vatican remplissent leur mission en aidant à promouvoir l’Église comme une communauté de disciples missionnaires, partageant l’Évangile et prenant soin de tous ceux qui sont dans le besoin.
Une partie de cet effort, a-t-il écrit, nécessite d’inclure davantage de laïcs dans les postes de direction de la Curie.
«Cette nouvelle constitution apostolique propose de mieux harmoniser l’exercice actuel du service de la Curie avec le chemin d’évangélisation que l’Église, surtout en cette saison, est en train de vivre», écrit le pape dans le document.
Le pape comme préfet
Pour souligner l’importance de la nature missionnaire de l’Église, le pape François précise dans la nouvelle constitution qu’il est le préfet du Dicastère pour l’évangélisation ; il sera assisté d’un «pro-préfet» pour les «questions fondamentales concernant l’évangélisation dans le monde» et d’un «pro-préfet» pour «la première évangélisation et les nouvelles Églises particulières», celles qui étaient auparavant soutenues par la Congrégation pour l’évangélisation des peuples.
De la même manière, jusqu’en 1968, les papes étaient préfets de ce qui est devenu la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Fusions et nouveaux dicastères
Pastor Bonus – la constitution apostolique promulguée par Jean-Paul II en 1988 pour réformer la Curie – commençait sa description de la responsabilité de la congrégation doctrinale en disant: «La tâche propre de la Congrégation pour la doctrine de la foi est de promouvoir et de garantir la doctrine de la foi et des mœurs dans le monde catholique tout entier: tout ce qui touche de quelque façon à cette matière relève donc de sa compétence.» (art. 48)
La nouvelle constitution commence sa description en disant que la tâche du «Dicastère pour la doctrine de la foi est d’assister le pontife romain et les évêques-épiscopes dans l’annonce de l’Évangile dans le monde entier, en promouvant et en sauvegardant l’intégrité de la doctrine catholique sur la foi et les mœurs, en s’appuyant sur le dépôt de la foi et en cherchant également à l’approfondir toujours davantage face aux nouvelles questions.»
La nouvelle constitution supprime les distinctions précédentes entre «congrégations» et «conseils pontificaux», les désignant tous simplement comme des «dicastères».
Outre la création du dicastère pour le service de la charité à la place de l’aumônerie, la constitution fusionne la Congrégation pour l’évangélisation des peuples et le Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation dans le nouveau Dicastère pour l’évangélisation, et elle fusionne la Congrégation pour l’éducation catholique et le Conseil pontifical pour la culture dans le nouveau Dicastère pour la culture et l’éducation.
Rôle accru pour les laïcs
Le document Praedicate Evangelium remplace la constitution de 1988 de Jean-Paul II, Pastor Bonus, mais, contrairement à celle-ci, il ne réserve pas la direction de certaines fonctions aux seuls cardinaux et évêques, bien que les statuts individuels de ces fonctions puissent contenir une telle spécification.
Toutefois, le pape François a écrit dans le document que les offices qui ont «leurs propres statuts et lois les observeront seulement dans la mesure où ils ne s’opposent pas à la présente constitution apostolique et proposeront leur adaptation à l’approbation du pontife romain dès que possible».
Insistant sur le fait que tout chrétien est «un disciple missionnaire», dit la constitution, la réforme de la Curie devait également «prévoir la participation des laïcs, hommes et femmes, y compris dans des rôles de gouvernance et de responsabilité».
La participation des laïcs «est indispensable, car ils coopèrent pour le bien de toute l’Église et, en raison de leur vie familiale, de leur connaissance des réalités sociales et de leur foi qui les conduit à découvrir les chemins de Dieu dans le monde, ils peuvent apporter des contributions valables, en particulier lorsqu’il s’agit de promouvoir la famille et le respect des valeurs de la vie et de la création, l’Évangile comme levain pour les réalités temporelles et le discernement des signes des temps.»
Décrivant le personnel des bureaux, la constitution dit que les dirigeants, «dans la mesure du possible, proviendront des différentes régions du monde afin que la Curie romaine reflète l’universalité de l’Église».
Ils peuvent être des clercs, des religieux ou des laïcs «qui se distinguent par une expérience appropriée, des connaissances confirmées par des qualifications adéquates, la vertu et la prudence. Ils doivent être choisis selon des critères objectifs et transparents et avoir un nombre adéquat d’années d’expérience dans les activités pastorales.»
Mission et synodalité
Le pape François a décrit la réforme de la Curie comme faisant partie de la «conversion missionnaire» de l’Église, un mouvement de renouveau visant à la faire refléter davantage «l’image de la propre mission d’amour du Christ».
Il l’a également relié au processus continu de promotion de la «synodalité», un sens de la responsabilité partagée de tous les catholiques baptisés pour la vie et la mission de l’Église.
La véritable communion entre tous les catholiques, a-t-il dit, «donne à l’Église le visage de la synodalité; une église, c’est-à-dire d’écoute mutuelle où chacun a quelque chose à apprendre: le peuple fidèle, le Collège des évêques (et) l’évêque de Rome s’écoutant les uns les autres, et tous écoutant l’Esprit Saint, l’esprit de vérité.»
La Curie doit servir
Répondant à l’une des principales préoccupations exprimées par les évêques du monde entier dans le passé, la constitution dit: «La Curie romaine ne se place pas entre le pape et les évêques, mais se met au service des deux selon des modalités propres à la nature de chacun.»
Le pape François a écrit qu’en réorganisant la Curie, il voulait promouvoir une «saine décentralisation» qui, en même temps, favoriserait la «coresponsabilité» et la communion avec les évêques et entre les bureaux du Vatican.
La Curie, a-t-il dit, devrait soutenir les évêques individuels dans leur mission de pasteurs ainsi que le travail des conférences épiscopales et des synodes des évêques catholiques orientaux.
Parce que «le visage du Christ» se reflète dans celui de ses disciples, les membres de la Curie romaine doivent être «distingués par leur vie spirituelle, leur bonne expérience pastorale, leur sobriété de vie et leur amour des pauvres, leur esprit de communion et de service, leur compétence dans les matières qui leur sont confiées et leur capacité à discerner les signes des temps».
L’évangélisation avant la doctrine
Dans l’ordonnancement de la Curie romaine, la Secrétairerie d’État conserve sa position de direction et de coordination, mais le nouveau Dicastère pour l’évangélisation est placé au-dessus du Dicastère pour la doctrine de la foi.
La description de l’organisation du dicastère doctrinal comprend les changements annoncés par le pape François en février, créant des sections doctrinales et disciplinaires distinctes, reflétant l’importance croissante du bureau qui enquête sur les allégations d’abus sexuels cléricaux et d’abus de fonction par des évêques ou des supérieurs religieux.
Protection des mineurs
La constitution place la Commission pontificale pour la protection des mineurs «au sein du dicastère» et précise que «sa tâche est de fournir au pontife romain des avis et des conseils et de proposer les initiatives les plus appropriées pour la protection des mineurs et des personnes vulnérables».
Le cardinal Seán P. O’Malley de Boston, président de la commission et membre du Conseil des cardinaux qui a rédigé la constitution, a déclaré: «Pour la première fois, le pape François a fait de la sauvegarde et de la protection des mineurs un élément fondamental de la structure du gouvernement central de l’Église.»
«Lier plus étroitement la commission au travail du nouveau Dicastère pour la doctrine de la foi représente une avancée significative dans l’amélioration de la place et du mandat de la commission, ce qui ne peut que conduire à une culture plus forte de la sauvegarde dans toute la Curie et dans toute l’Église», a-t-il déclaré dans une déclaration le 19 mars.