*Lettre ouverte rédigée à l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés qui a lieu le 20 juin.
Au fil des dernières années, en ma qualité de directeur national d’une agence papale travaillant auprès des Églises et des peuples de l’Orient, j’ai rencontré de nombreuses personnes qui avaient pris la douloureuse décision de quitter leur pays.
Lorsque je leur demande pourquoi elles ont quitté leur maison, leurs réponses varient. Une mère syrienne m’a expliqué qu’elle ne voulait pas que ses filles soient violées. Une femme du nord de l’Éthiopie a décrit comment, pendant une décennie, l’eau a été une rareté dans sa ville en raison des changements environnementaux. Un ressortissant ukrainien m’a fait part de son désespoir en exprimant son sentiment de résignation en ces termes: «La Russie ne laissera jamais l’Ukraine tranquille.» Enfin, un chrétien d’Irak m’a expliqué comment, jadis, son peuple vivait en paix avec les musulmans alors qu’aujourd’hui, ce sont les fanatiques qui ont pris leur place et que leurs communautés ne sont plus les bienvenues.
Certains d’entre eux vivent désormais au Canada. Toutefois, la plupart ont été forcés de quitter leur domicile et tentent tant bien que mal de survivre au long périple vers une vie meilleure. Malheureusement, certains échoueront. Ils mourront en cours de route: en bateau, en tentant de traverser la Méditerranée ou en fuyant par le désert à partir de l’Afrique équatoriale. D’autres seront abattus froidement pour avoir quitté leur pays d’origine,
Quitter son pays afin d’améliorer la vie de ses enfants constitue une décision importante. Les gens de partout ont une ambition commune: travailler et contribuer au développement de la société dans laquelle ils vivent. Toutefois, lorsque cela s’avère impossible, la plupart se sentent contraints de quitter leur maison. Au cours des 18 dernières années, il y a eu un nombre croissant de migrants en mouvement chaque année.
Selon des statistiques provenant des Nations Unies, on comptait 150 millions de migrants à l’échelle mondiale en 2000. En 2018, ce chiffre a atteint un échelon sans précédent de 258 millions de migrants, dont 22,5 millions sont des réfugiés.
Comme l’a déclaré le pape François dans son message du 1er janvier 2018: pour trouver la paix, les migrants «sont disposés à risquer leur vie au long d’un voyage qui, dans la plupart des cas, est aussi long que périlleux; ils sont disposés à subir la fatigue et les souffrances, à affronter des clôtures de barbelés et des murs dressés pour les tenir loin de leur destination. Avec un esprit miséricordieux, nous étreignons tous ceux qui fuient la guerre et la faim ou qui sont contraints de quitter leurs terres à cause des discriminations, des persécutions, de la pauvreté et de la dégradation environnementale.»
Le phénomène des migrants est devenu l’une des questions les plus pressantes du XXIe siècle. De nombreux pays finissent d’ailleurs par imploser. C’est le cas de la Syrie, qui génère de soudains mouvements de masse. On observe également une augmentation du nombre de catastrophes naturelles, comme les inondations et la sécheresse extrême ainsi que l’accroissement de la pauvreté et de la violence continue des mouvements fanatiques au Moyen-Orient, en Inde, au Nigeria et dans bien d’autres pays.
Chez CNEWA, nous travaillons sans relâche avec les diverses Églises du Moyen-Orient, d’Europe de l’Est et d’Afrique du Nord-Est afin d’améliorer la vie des populations locales et de répondre aux divers mouvements de réfugiés. S’il est vrai que nous améliorons l’existence de nombreuses personnes et leur donnons un soupçon d’espoir, la situation demeure très fragile et toute récession économique ou conflit interne pourrait réduire à néant le progrès que nous avons accompli jusqu’à maintenant. Le pape François a raison: seule la paix est en mesure d’assurer notre souci pour la santé de notre planète et des gens qui y habitent. La question des migrants ne disparaîtra pas de sitôt et des pays comme le Canada devront mettre sur pied une stratégie robuste pour accueillir, protéger et intégrer les nouveaux arrivants et partager ensuite cette nouvelle ligne de conduite avec le monde.
Carl Hétu
Directeur national, CNEWA Canada