Tensions politiques, militaires, économiques: à Bogotá, nombreux sont les prélats qui ont martelé leur conviction que l’Église catholique peut encore jouer un rôle clé dans les pays d’Amérique.
Selon le cardinal Gérald Cyprien Lacroix, l’Église peut contribuer à panser les plaies et à atténuer les clivages qui déchirent les peuples du continent américain.
«D’un bout à l’autre des Amériques, du pôle Nord à la Patagonie, les gens ont besoin de l’Église catholique, de son clergé, de ses membres. Il y a beaucoup de souffrances sur ce continent. Les gens souffrent. Les nations s’entredéchirent. Nous devons partager avec tous ces gens l’amour de Dieu», a ajouté le cardinal Lacroix.
L’archevêque de Québec a prononcé ces paroles en marge du Jubilé des Amériques qui s’est tenu à Bogotá, en Colombie, du 27 au 30 août.
Cette édition panaméricaine du Jubilé extraordinaire de la miséricorde, orchestrée par la Commission pontificale pour l’Amérique latine et le Conseil épiscopal de l’Amérique latine, a réuni près de 400 personnes dans la capitale colombienne, dont une quinzaine de cardinaux et une centaine d’évêques.
«On ne peut plus se contenter de prêcher [en faveur de la miséricorde]: il faut aussi passer de la parole aux actes», a soutenu le cardinal Lacroix.
L’évêque haïtien d’Anse-à-Veau et Miragoâne, Mgr Pierre-André Dumas, lui-même issu du pays le plus pauvre de l’hémisphère, a souhaité que l’Église en fasse davantage pour les plus démunis.
«Il faut faire rayonner la miséricorde dans les rues des villes et des villages de l’Amérique latine, des Antilles et du monde entier», a ajouté Mgr Dumas .
Les participants au Jubilé des Amériques ont visité des quartiers défavorisés de Bogotá pour y découvrir une vingtaine de projets financés et animés par l’Église catholique.
Aux yeux du cardinal hondurien Oscar Rodriguez Maradiaga, ces projets témoignent de l’engagement quotidien des communautés ecclésiales en faveur de la solidarité sociale. «Nous ne nous sommes pas contentés de réfléchir à la miséricorde. Nous l’avons vue en pleine action, à travers ces projets», a affirmé l’archevêque de Tegucigalpa.
De Bogotá à Saint-Jean-Longueuil
Cette tournée de la capitale colombienne a permis aux participants de visiter des soupes populaires, des banques alimentaires ou des maisons d’hébergement pour personnes handicapées.
Présent au Jubilé des Amériques, l’évêque de Saint-Jean-Longueuil, Mgr Lionel Gendron a visité un projet piloté par les sœurs Adoratrices du Saint-Sacrement. Elles œuvrent auprès des prostituées des bas-fonds de Bogotá. Selon Mgr Gendron, dans son propre diocèse, des projets veillent à la réinsertion sociale des personnes itinérantes.
«Ce dont notre monde a besoin, c’est de voir et de ressentir l’amour et la miséricorde de Dieu. C’est cette idée-là qui a été mise de l’avant tout au long de cette rencontre et que je vais tenter de faire rayonner chez nous», a-t-il dit.
Un jubilé dans une Colombie pacifiée
Le Jubilé des Amériques s’est réuni à Bogotá quelques jours après qu’un cessez-le-feu définitif soit intervenu entre le gouvernent colombien et les guérilleros marxistes des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Ce conflit armé a ensanglanté les pays pendant près de cinq décennies et fait plus de 220 000 morts. Les rebelles et le gouvernement prévoient signer ce traité de paix au cours des prochaines semaines, à La Havane.
Longtemps missionnaire en Colombie, le cardinal Lacroix s’est réjoui du cessez-le-feu. C’est, a-t-il commenté, un éloquent témoignage des clivages qui peuvent se créer au sein d’une société. Mais aussi du rôle-clé que peut jouer l’Église dans la pacification des mœurs. [NDLR : l’Église catholique a joué un rôle important dans les négociations de paix en Colombie.]
«Nous avons abondamment discuté [lors de ce jubilé] de la nécessité de mettre en place un climat de paix. Non seulement dans des pays comme la Colombie et le Venezuela, mais aussi au Canada, aux États-Unis et dans nos communautés locales. Toutes ces collectivités ont besoin d’être pacifiées, de trouver une paix intérieure», a-t-il ajouté.
«Ce processus-là demande beaucoup de temps. Nous devons donc nous assurer de cheminer aux côtés des gens, tout au long de cette démarche».
Ezra Fieser, Catholic News Service
Trad. et adapt. F. Barriault, pour Présence