Président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), Michael Sabia prend «très au sérieux» les allégations de relations d’affaires douteuses avancées par Le Journal de Montréal concernant des dirigeants d’Otéra Capital.
Le 5 février, des journalistes d’enquête du quotidien montréalais ont révélé qu’une vice-présidente d’Otéra Capital serait «une partenaire d’affaires et de cœur d’un prêteur privé longtemps lié au clan mafieux Rizzuto». Quelques jours plus tard, Le Journal de Montréal indiquait qu’un partenaire d’affaires du président d’Otéra Capital aurait reçu d’importants prêts.
Parce que «l’intégrité est un principe non-négociable sur lequel aucun compromis ne sera fait», la CDPQ a aussitôt lancé une enquête interne «menée par un avocat externe afin que toutes les vérifications soient faites». Michael Sabia, le grand patron de la Caisse, a indiqué que les conclusions de cette enquête seront rendues publiques.
L’archevêque de Montréal, Mgr Christian Lépine, s’intéresse lui aussi à cette enquête et à ses conclusions. Pourquoi? Parce qu’elles concernent notamment Alfonso Graceffa, le président du conseil d’administration et le chef de la direction d’Otéra Capital.
Alfonso Graceffa est un nom bien connu à l’archevêché de Montréal ainsi que dans les milieux catholiques. Il y a un peu plus de deux ans, l’archevêché a multiplié les démarches pour que lui et un autre délégué montréalais soient élus à la tête de la nouvelle Mutuelle d’assurance en Église, la compagnie d’assurance d’un grand nombre de paroisses et d’institutions religieuses québécoises.
La campagne électorale en faveur de M. Graceffa fut telle que six participants à l’assemblée générale de la Mutuelle d’assurance en Église ont même envoyé, en septembre 2017, une lettre à Mgr Luigi Bonazzi, nonce apostolique et représentant du pape François au Canada, afin de dénoncer «toutes les tactiques faites depuis novembre 2016 par l’archidiocèse de Montréal afin de faire élire Alfonso Graceffa et Ferdinand Alfieri au conseil d’administration».
Le vendredi 8 février 2019, «Alfonso Graceffa a offert de se retirer de toutes ses fonctions dans les filiales immobilières de la Caisse pendant cette enquête afin de faire la lumière sur tous les faits», a fait savoir la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Le candidat élu de l’archevêché de Montréal devrait-il aussi se retirer du conseil d’administration de la Mutuelle d’assurance en Église durant le temps de l’enquête commandée par la CDPQ?
«Relativement aux allégations de conflit d’intérêts qui ont été rendues publiques récemment, l’archevêché pourrait réévaluer la situation en fonction des conclusions que la Caisse de dépôt et placement du Québec a affirmé vouloir rendre publiques», a indiqué Erika Jacinto, directrice des communications et de relations avec les médias de l’archidiocèse de Montréal. «L’archevêché ne souhaite pas commenter davantage», a-t-elle ajouté.
Du côté de la Mutuelle d’assurance en Église, le président du conseil d’administration n’entendait pas se prononcer sur cette affaire. «Je n’ai pas de commentaires à faire», a dit Gabriel Groulx, élu en avril 2018 au conseil d’administration, puis nommé président quelques mois plus tard.
«On ne va pas commenter cette affaire. Il n’y a pas un journaliste qui va m’amener à donner des commentaires sur des dossiers qui ne concernent pas la Mutuelle. Je le répète, aucun commentaire.»
Gabriel Groulx assure toutefois que «M. Graceffa, en tant que membre du conseil d’administration de la Mutuelle, a toujours respecté l’ensemble de nos règles».
«Tout se passe dans les règles de l’art. En tant que président, et je suis certain que c’est le cas des autres administrateurs, je suis très satisfait de la façon dont ça se passe», a-t-il tout de même ajouté.
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