Dans la foule, tout le monde se demandait comment les organisateurs de la Rencontre mondiale des familles accueilleraient 20 000 personnes dans le grand hall du Centre de convention de Philadelphie, qui n’a évidemment pas une capacité d’accueil équivalente à celle d’un amphithéâtre.
Depuis dimanche, Philadelphie devient progressivement le centre du monde catholique, alors qu’avions, autobus et trains déversent dans la « ville de l’amour fraternel » vagues après vagues de pèlerins et de touristes venant assister au plus grand happening catholique consacré à la famille.
Ils ne sont finalement que quelques milliers à avoir assisté au coup d’envoi de la première rencontre du genre à se tenir dans un pays qui n’est pas majoritairement catholique. Le grand hall à moitié occupé laissait amplement d’espace aux nombreux enfants pour jouer et gambader derrière la foule qui se massait en face de l’estrade où se succédaient les discours de circonstance, prononcés entre autres par l’archevêque de Philadelphie, Charles Chaput, et le président du Conseil pontifical pour la famille, Mgr Vicenzo Paglia.
Dans l’assemblée bigarrée, on entendait ici et là des bribes de Molière.
Pas étonnant quand on sait que pas moins de 160 personnes viennent du Québec, un morceau considérable d’une délégation canadienne estimée à 1000 personnes. Les plus grandes délégations québécoises sont celles de Québec, de Valleyfield et de Montréal, avec des groupes comptant de 20 à 30 personnes.
Le groupe de Trois-Rivières compte 14 personnes, dont une famille de neuf. D’autres diocèses, comme Chicoutimi et Sainte-Anne-de-la-Pocatière, n’ont pas envoyé de délégation.
À Chicoutimi, l’abbé Jacques Bouchard précise que certaines personnes de la région ont peut-être choisi d’y aller, mais que le diocèse n’est pas au courant de ces démarches individuelles. Quant à La Pocatière, l’évêque, Mgr Yvon-Joseph Moreau, confirmait que le diocèse avait tout simplement choisi de ne pas envoyer de délégation, précisant qu’il n’était lui-même pas un grand amateur de ces gigantesques rencontres internationales.
Dans le grand hall, Michèle Boulva suivait le début de la cérémonie d’ouverture. La directrice de l’Organisme catholique pour la vie et la famille (OCVF), lié à la Conférence des évêques catholiques du Canada, est à la Philadelphie à la fois comme participante et comme intervenante. Le mercredi 23 septembre, elle animera une session sur « le Christ qui unit les familles reconstituées ».
« Le Christ unit toutes les familles, dans le fond », lance-t-elle tout en gardant un œil sur les discours. Elle n’a que de bons mots pour le programme proposé par la Rencontre mondiale des familles. L’événement compte effectivement son lot de vedettes catholiques internationales, à commencer par l’Américain Robert Barron – qui prononçait aujourd’hui la première conférence – et le cardinal philippin Luis Antonio Tagle, que plusieurs imaginaient sur la cathèdre de saint Pierre lors du conclave de 2013. Mais l’attention de Mme Boulva se portait plutôt sur le philosophe français Yves Semen, « la » sommité mondiale francophone en matière de « théologie du corps », un mouvement réflexif catholique inspiré de Jean-Paul II fortement ancré à Philadelphie et qui compte de nombreux adeptes au Québec.
À quelques pas d’elle se trouvait Amélie Martineau-Lavallée, la responsable de la pastorale familiale pour le diocèse de Québec. La jeune théologienne affirmait non sans fierté que le diocèse de Québec avait envoyé à Philadelphie la plus grande délégation québécoise, avec 30 personnes.
« It has begun [ndlr : ça a débuté] », a lancé le maire de Philadelphie, Michael Nutter, en guise d’introduction à un discours bien senti. Il a été le seul orateur à véritablement soulever la foule, notamment lorsqu’il a affirmé que si le pape vient, c’est grâce à la rencontre des familles dans sa ville.
L’enthousiasme communicatif et les talents d’orateur du maire faisaient sourire le père Yoland Ouellet et Pierre Montreuil, respectivement recteur et responsable des communications pour le sanctuaire marial de Notre-Dame-du-Cap, à Trois-Rivières. Les deux hommes sont en ville pour promouvoir les sanctuaires nationaux du Québec. Le père oblat Ouellet se concentre sur ce « lobbying spirituel » auprès du clergé, tandis que M. Montreuil fait de même auprès laïcs. Ils ne voulaient pas rater l’occasion de profiter d’un tel rassemblement pour rappeler aux Américains que « le Québec compte de magnifiques sanctuaires à quelques heures de route à peine ».
La délégation québécoise compte également de nombreux évêques, dont Christian Lépine, de Montréal, Noël Simard, de Valleyfield et Paul-André Durocher, de Gatineau. Le cardinal de Québec, Gérald Lacroix, animera une session en français jeudi.
La cérémonie d’ouverture a pris fin dans une ambiance digne des tapis rouges. Alors que des chants de louange rythmés entendaient donner le ton à la semaine, la foule s’agglutinait autour des prélats catholiques, qui se prêtaient volontiers au jeu, sourire aux lèvres.
Il y aura un temps pour débattre des enjeux pastoraux et théologiques sur la question de la famille au cours de la semaine. Mais aujourd’hui, c’était d’abord la fête.