Les gens se marient de moins en moins au Québec. Chez ceux et celles qui ont 40 ans et moins, on préfère l’union libre. Et lorsque deux personnes choisissent de s’épouser, c’est de moins en moins devant un ministre du culte.
Scrutant chaque année les milliers de relevés que signent les nouveaux époux après leur mariage, la démographe Anne Binette Charbonneau confirme ces tendances. C’est elle qui signe le chapitre sur les mariages, la nuptialité et la situation conjugale des Québécois dans l’édition 2017 du Bilan démographique du Québec, une publication annuelle de l’Institut de la statistique du Québec. Sa conclusion pour l’an 2016 est directe: «le nombre des mariage religieux diminue au sein de l’ensemble des mariages au bénéfice des mariages civils qui continuent de gagner en popularité».
En compilant les bulletins de mariage qui sont remplis puis acheminés au Directeur de l’état civil du Québec, Mme Binette Charbonneau peut même dire avec exactitude que 21 949 mariages ont été célébrés au Québec en 2016 lors de cérémonies civiles ou religieuses, soit 450 de moins qu’en 2015.
La démographe ajoute qu’en 2016, c’est moins de la moitié des mariages qui ont été célébrés devant un ministre du culte. Plus précisément, 42 % des mariages de conjoints de sexe opposé se sont tenus devant un prêtre, un pasteur ou un officiant mandaté par l’une ou l’autre des quelque 300 institutions religieuses, religions ou Églises reconnues par le Directeur de l’état civil du Québec. Lorsque les conjoints sont de même sexe, seuls 13 % des mariages ont été célébrés devant un ministre du culte.
Le rapport annuel de l’Institut de la statistique du Québec ne mentionne toutefois pas le nombre de mariages qui ont été célébrés par chacun des différents ministres du culte ou encore le lieu où s’est tenu le mariage religieux. On ne sait donc pas quelle Église célèbre le plus de mariages au Québec, ni combien de mariages entre partenaires de même sexe ont été présidés par des prêtres ou des pasteurs de l’Église Unie ou encore de l’Église anglicane, par exemple. (En juillet 2016, les dirigeants de l’Église anglicane du Canada ont approuvé une modification des statuts de l’Église afin de permettre le mariage entre conjoints de même sexe, un vote qui doit toutefois être tenu de nouveau lors du Synode général de cette Église en 2019.)
Les données du Bilan démographique du Québec révèlent qu’en 2016, dans le tiers des mariages célébrés, au moins l’un des partenaires a déjà été marié. On apprend aussi que trois mariages sur dix comptent au moins un conjoint né à l’étranger. Enfin, l’auteure peut aussi affirmer que «les trois quarts des couples choisissent de se marier un samedi» plutôt qu’un autre jour de la semaine.
L’âge des mariés n’a pas cessé d’augmenter depuis 80 ans, observe encore Anne Binette Charbonneau. «À 25 ans, 54 % des hommes et 70 % des femmes nés en 1945-1946 étaient mariés. Chez les hommes et les femmes nés vingt ans plus tard, soit en 1965-1966, cette proportion n’était plus que de 14 % et de 28 % respectivement. La baisse s’est poursuivie chez les générations nées dans les années 1970 et encore un peu chez celles qui sont nées au cours de la décennie 1980. À peine 2 % des hommes et 5 % des femmes de la génération 1991-1992 sont mariés à 25 ans», a calculé la démographe.
Elle confirme qu’aujourd’hui «l’union libre est plus populaire que le mariage chez les moins de 40 ans». À titre de comparaison, elle note qu’en 1981, «seulement 8 % des personnes vivant en couple n’étaient pas mariées avec leur conjoint. Cette part s’est élevée progressivement au cours des années suivantes et se situe à 39 % en 2016».
Se mariera-t-on encore à l’église dans vingt-cinq ans? «C’est difficile de faire des projections dans ce domaine parce que ce sont des événements liés à la culture», dit Anne Binette Charbonneau. «Si pour une raison, les gens retrouvaient le désir de se marier et de se marier devant un ministre du culte, ce serait possible. Mais c’est bien difficile de voir dans quelle direction cela pourrait aller».
La décision de se marier ou de vivre en union libre est liée à des normes sociales, note-t-elle. «Si tous nos amis ont agi ainsi, alors on fait de même.»