«C’est avec tristesse que je dois vous demander d’annoncer à notre peuple, de même qu’à nos amis des Amériques et du monde, qu’aujourd’hui, le 25 novembre, à 22h29, est décédé Fidel Castro, commandant en chef de la Révolution cubaine.» C’est en ces termes que Raul Castro a annoncé la mort de son célèbre frère, décédé à l’âge de 90 ans.
En 2006, Raul Castro avait pris le relais de son frère à la tête de l’île communiste, après que celui-ci soit devenu trop malade pour diriger le pays.
Un héritage contrasté
Jusqu’alors, Fidel Castro avait gouverné le pays de manière ininterrompue depuis 1959, l’année de la révolution au cours de laquelle la guérilla dirigée par Castro et Ernesto Che Guevara a mis un terme à la dictature de Fulgencio Batista.
Au fil des ans, Fidel Castro a fait face à plusieurs tentatives de coup d’État, dont certaines commanditées par les États-Unis. Plusieurs Latino-Américains se sont identifiés à Castro et à sa lutte contre la mainmise économique et «impérialiste» des États-Unis sur les pays de l’hémisphère.
Pour plusieurs autres, toutefois, Castro était d’abord et avant tout un dictateur, de même qu’une menace. C’est notamment le cas des personnes dont les propriétés, résidences et entreprises ont été saisies et nationalisées par le régime communiste cubain, sans aucune compensation. Au fil des ans, Fidel Castro a été accusé de s’être livré à toutes sortes de méfaits: arrestation, emprisonnement et exécution de dissidents, persécution des croyants et des institutions religieuses.
Certaines personnes continuent cependant de montrer Cuba en exemple et d’en faire un modèle à imiter en Amérique latine, que ce soit en matière d’éducation et de soins de santé, ou en matière d’égalité raciale et sexuelle. Pour certains observateurs, la précarité économique de Cuba n’est pas imputable au régime castriste mais plutôt à l’embargo américain contre l’île communiste.
Les condoléances de l’évêque de Miami
Prenant acte des opinions très contrastées qu’éprouvent ses concitoyens à l’égard de Fidel Castro, l’archevêque de Miami, Mgr Thomas Wenski, a réagi par communiqué, le 26 novembre. Bon nombre de diocésains de Mgr Wenski sont des exilés cubains.
«Son décès provoque toute sortes d’émotions, de part et d’autre sur l’île de Cuba. Par-delà toutes les émotions que suscite le décès de ce personnage, tâchons malgré tout d’invoquer la sainte patronne de Cuba, la Vierge de la Charité, afin qu’elle apporte la paix à Cuba et à son peuple», a-t-il écrit.
Dans la messe qu’il a célébrée ce jour-là à l’Ermitage de la Charité de Miami, Mgr Wenski a mentionné avoir a appris le décès de Fidel Castro quelques heures avant le premier du dimanche de l’Avent. Il a rappelé aux fidèles que «tous les êtres humains, nous tous, allons un jour ou l’autre mourir et nous ferons tous face au jugement [de Dieu]. C’est maintenant au tour de [Fidel Castro] d’être jugé».
Barack Obama tend la main aux Cubains
Le président américain Barack Obama a affirmé vouloir «tendre une main amicale au peuple cubain», tout en étant parfaitement conscient des avis contrastés de ses concitoyens à l’égard de Fidel Castro. Rappelons qu’en 2015, l’administration Obama a rétabli ses relations diplomatiques avec Cuba.
«Nous sommes conscient du fait que cet événement est une source d’émotions vives pour les Cubains, tant à Cuba qu’aux États-Unis. Fidel Castro a en effet exercé une influence sur la trajectoire des individus, des familles et de toute la nation cubaine. L’histoire le jugera à la lumière de ses actes et de l’impact qu’il a eu sur son peuple et sur le monde», a affirmé le président américain.
Dans une entrevue qu’il accordait à la radio espagnole COPE, le président de la conférence épiscopale cubaine, Mgr Dionisio García Ibáñez, soutenait que les changements de dirigeants politiques sont souvent une source de changement pour les pays que ceux-ci gouvernaient. Or, aux yeux de l’archevêque de Santiago de Cuba, Fidel Castro exercera une influence durable sur son pays: «La figure de Fidel a été si significative, si influente, qu’elle exercera sans doute un impact permanent sur la société [cubaine] ».
Les condoléances du pape
Dans un télégramme rédigé en espagnol et envoyé au président Raul Castro, le pape François a exprimé ses condoléances pour la «triste nouvelle» qu’est «le décès de votre cher frère». Rappelons que le pape a joué un rôle-clé dans le rapprochement diplomatique entre Cuba et les États-Unis. Il s’est d’ailleurs empressé d’offrir ses condoléances au gouvernement et au peuple de Cuba, en promettant de prier pour eux.
Dans ses déclarations publiques, Raul Castro a maintes fois exprimé son admiration pour le pape François. Les relations entre l’Église catholique et l’État cubain ont cependant été assez conflictuelles au fil des ans.
Peu après la révolution de 1959, les catholiques cubains, comme d’ailleurs l’ensemble des groupes religieux du pays, ont fait l’objet de diverses vexations de la part du régime communiste: saisie d’églises, d’écoles et d’autres propriétés; emprisonnement ou expulsion de prêtres, religieux et religieuses accusés de se livrer à des «activités contre-révolutionnaires». Il en est résulté un étiolement de la foi et de l’Église catholiques, d’autant qu’au plus fort de l’influence de l’Union soviétique sur le régime de Castro, l’État communiste cubain était officiellement athée.
Au cours des dernières années, les relations entre l’Église catholique et l’État cubain se sont améliorées. L’Église a récupéré certaines propriétés qui avaient été saisies et nationalisées. En 2015, le gouvernement de Raul Castro a même autorisé l’Église catholique à bâtir une nouvelle église sur le territoire cubain: une première en plus de 50 ans.
En 1998, au terme de la visite officielle du pape Jean-Paul II à Cuba, le régime castriste a commencé à assouplir sa politique antireligieuse. Depuis, tous les papes ont rendu visite à Fidel Castro lors de leurs visites officielles sur l’île communiste.
La dernière apparition publique Fidel Castro a eu lieu le 16 novembre. Il avait alors rencontré le président du Vietnam. Dans la vidéoconférence annonçant le décès de Fidel Castro, le président Raul Castro a annoncé le désir de son frère d’être incinéré.
Le journal Granma, organe officiel du Parti communiste cubain, a annoncé la tenue de neuf jours de deuil national, entre le 26 novembre et le 4 décembre. Les cendres de Fidel Castro seront exposées publiquement dans diverses localités du pays. Les Cubains endeuillées pourront honorer la mémoire de leur ex-dirigeant lors d’assemblées publiques prévues à cet effet. Ses cendres seront ensuite inhumées au cimetière de Sainte-Iphigénie de Santiago de Cuba, là où repose également la dépouille de José Marti, figure emblématique de la guerre d’indépendance de Cuba.
D’après Catholic News Service