Bien qu’elle n’ait pas encore terminé «l’examen d’un certain nombre de partenaires de Développement et Paix», la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) a acheminé une lettre d’appui à la prochaine campagne Carême de partage de l’organisme. Cette campagne débutera le 6 mars 2019, mercredi des Cendres.
Chaque année, au début du mois de décembre, le président de la CECC remet une lettre officielle à Développement et Paix afin qu’elle soit insérée dans le matériel que l’organisme de solidarité internationale produit pour sa campagne annuelle de financement. Ce matériel est imprimé en très grandes quantités et est distribué durant le mois de janvier aux paroisses canadiennes qui souhaitent en remettre des exemplaires à leurs paroissiens dès le premier dimanche du carême (en 2019, le 10 mars).
Le vendredi 16 novembre, Serge Langlois, directeur général de Développement et Paix, avait annoncé aux membres de son organisme que «même si des questions ont été posées quant à la campagne du Carême de partage 2019, nous avons confiance qu’une solution à cette crise sera trouvée, permettant ainsi à l’Église de confirmer sa participation» à cette campagne de financement. Développement et Paix recueille en moyenne 8 M $, le tiers de son budget, par cette campagne.
«Nous avons reçu la lettre d’appui de Mgr [Lionel] Gendron à la campagne du Carême de partage 2019», a confirmé le 17 décembre Khoudia Ndiaye, agente de communications pour Développement et Paix. «Cette lettre sera publiée sous peu.»
L’évêque de Saint-Jean-Longueuil et actuel président de la CECC y «invite les fidèles à partager le chemin avec Développement et Paix et à participer activement aux actions proposés» par l’organisme, indique Mme Ndiaye.
Au début du Carême de partage 2018, Mgr Gendron avait demandé aux catholiques de «[soutenir] cette campagne qui nous touche, ainsi que notre monde, au plus profond de l’être». «Renseignons-nous sur l’impact des actions menées par Développement et Paix en Afrique, en Amérique latine, en Asie et au Moyen-Orient», avait-il ajouté.
Peu après la collecte effectuée dans les églises le cinquième dimanche du carême, douze diocèses canadiens ont annoncé publiquement qu’ils retenaient les sommes versées pour Développement et Paix parce qu’une étude interne indique que «quelque quarante partenaires [de l’organisme] semblent montrer des signes de conflit avec l’enseignement moral et social catholique».
Développement et Paix n’a pas souhaité divulguer la lettre pour 2019 de Mgr Gendron avant qu’elle ne soit publiée dans le matériel du carême. Au moment d’écrire ces lignes, la CECC n’avait pas encore rendu public le texte signé par son président.
Lettre d’appui d’une province oblate
Par ailleurs, l’organisme n’a pas voulu commenter une lettre qu’a acheminée, le 7 décembre, le provincial oblat Ken Forster au directeur général de Développement et Paix. Responsable d’une des provinces oblates du Canada (la province OMI Lacombe), le père Forster s’inquiète devant le fait que la CECC ait initié une étude Web des partenaires de l’organisme «sans la connaissance et la participation de Développement et Paix ou de ces organisations partenaires».
«Cette procédure semble très irrégulière et ne donnera probablement aucun résultat», estime le provincial oblat qui ajoute que sa communauté missionnaire a aussi été consternée d’apprendre que, «sur la base de cette « recherche », une douzaine d’évêques ont décidé cette année de retenir les dons déjà reçus des paroissiens pour des projets de Développement et Paix».
S’il ne peut être contre l’idée que les sommes recueillies soient «utilisées que par des organismes dont la mission, les valeurs et les pratiques coïncident avec les enseignements de l’Église catholique», il doit admettre qu’aujourd’hui, un grand nombre d’institutions «sont entachées (tainted) et non pures, y compris l’Église catholique au Canada».
L’oblat Ken Forster demande au directeur général Serge Langlois de faire connaître le soutien de sa congrégation religieuse aux employés, aux membres du conseil national – la plus haute instance de l’organisme – ainsi qu’aux membres de Développement et Paix de tout le Canada. De plus, iI souhaite que le directeur général présente, au nom des oblats canadiens, des excuses aux partenaires de l’organisme qui, en raison de ces tensions avec l’épiscopat, voient ou verront leur financement être aboli, momentanément ou de façon permanente.
Enfin, le provincial recommande fortement à Développement et Paix d’informer davantage la population catholique et les membres de l’organisme sur les conséquences de cette «crise» dont les principales victimes, «sans aucun doute», sont les pauvres des pays du Sud.
Développement et Paix ne fera «aucun commentaire concernant la lettre d’appui de l’oblat Ken Forster», a indiqué lundi l’agente de communications, Khoudia Ndiaye.
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