Les évêques du Canada pourraient adopter jeudi, par un vote de principe, de nouvelles politiques sur la protection des personnes mineures.
Le document qui sera présenté en après-midi aux 80 évêques présents à l’assemblée plénière annuelle de la Conférence des évêques catholique du Canada (CECC) va conseiller les diocèses sur la mise en place des mesures de protection des mineurs et la prévention des abus sexuels dans l’Église catholique. Il traitera aussi de la gestion des allégations faites à l’encontre de membres du clergé ainsi que de la guérison de ceux et celles qui ont été abusés par des prêtres et des religieux.
En juin 1992, les évêques canadiens avaient publié un rapport intitulé De la souffrance à l’espérance, entièrement consacré aux agressions sexuelles commises par des prêtres. Au lendemain du scandale de l’orphelinat Mount Cashel de St. John’s à Terre-Neuve, alors que des membres et d’ex-membres de la congrégation des Christian Brothers ont été reconnus coupables d’agressions sexuelles et de sévices physiques contre des enfants qui leur étaient confiés, les évêques avaient souhaité «proposer des voies et moyens aussi bien pour éliminer dans l’Église les séquelles de scandales passés que pour prévenir de nouveaux cas d’agressions contre des enfants».
Vingt-cinq ans plus tard, l’adoption de nouvelles normes par le Vatican en matière de protection des enfants rend nécessaire la révision des normes et des politiques de la conférence épiscopale, explique Mgr Anthony Mancini, archevêque d’Halifax-Yarmouth et président du Comité ad hoc sur la protection des personnes mineures mis sur pied par la CECC en 2012.
«On a préparé des politiques en lien avec les exigences nouvelles canoniques. On a demandé à toutes les conférences épiscopales d’amender ou de proposer des recommandations qui tiennent compte de la pensée de Rome sur ces questions», indique Mgr Mancini.
Depuis l’adoption des politiques de 1992, de nouveaux scandales sexuels impliquant des prêtres et même des évêques ont sévèrement miné la crédibilité de l’Église catholique. «Durant cette période, on a vécu bien des choses à travers Canada et à travers le monde. Rome a appris certaines leçons, nous aussi, on a appris nos leçons», reconnaît l’archevêque.
«Quand les évêques ont rédigé le premier texte [celui de 1992], c’était en réaction aux abus sexuels.» Les nouvelles politiques s’intéresseront plutôt à la protection des personnes mineures. Une nouvelle terminologie qui indique bien le «changement dans compréhension de la réalité que l’on a aujourd’hui», fait valoir Mgr Mancini. «Ce n’est pas un document contre les abus sexuels. C’est un document qui met la protection des jeunes comme une responsabilité essentielle des évêques en tant que responsables de l’Évangile et l’Église.»
Les congrégations religieuses
Ces deux dernières années, des jugements dans des affaires d’abus sexuels commis par des prêtres ont été rendus contre des communautés religieuses. Elles ont fait plus de bruit, au Québec du moins, que les accusations contre des prêtres diocésains, notamment à cause du nombre de victimes.
En août 2015, 111 victimes d’agressions sexuelles, tous d’ex-élèves au Séminaire Saint-Alphonse, une école sous la responsabilité des pères rédemptoristes de Sainte-Anne-de-Beaupré, ont reçu près de 14 millions $ de la part de cette congrégation. En février 2016, une entente intervenue entre les Clercs de Saint-Viateur et des victimes d’abus sexuels qui ont étudié et vécu à l’Institut des sourds de Montréal – on ne connaît pas encore leur nombre – a été entérinée par la juge Eva Petras de la Cour supérieure du Québec. Les victimes se partageront une somme record de 30 millions $. Les Clercs de Saint-Viateur verseront à eux seuls les deux tiers de cette somme.
Mgr Mancini indique que le rapport du comité ad hoc qu’il préside consacrera une section complète aux communautés religieuses et aux responsabilités de leurs supérieurs. «On va soumettre des recommandations qui vont aider les supérieurs majeurs ainsi que les évêques dans leurs interventions auprès des membres des communautés religieuses», explique-t-il.
Mgr Anthony Mancini présentera une dernière fois jeudi – «je l’espère», dit-il – le document préparé par son comité afin d’obtenir un vote de principe sur son acceptation.
«Les évêques connaissent le document, ils l’on déjà reçu. Et ils auront encore du temps pour l’étudier, faire des suggestions et y apporter des amendements», dit-il. Mais en janvier 2017, lors d’une rencontre du conseil permanent de la CÉCC, l’instance qui dirige la conférence épiscopale entre ses assemblées plénières, Mgr Mancini «présentera la version finale» qui sera ensuite rendue publique.
Jeudi, l’examen du document durera une heure, selon l’horaire de l’assemblée plénière qui a été remis aux médias. À 15h15, Mgr Mancini présentera officiellement le Rapport du comité ad hoc sur la protection des personnes mineures ainsi que ses recommandations. S’ouvrira ensuite une brève période de questions qui sera suivie par «des discussions en petits groupes». Un «vote de principe» est prévu à 16h15.
Les journalistes ne peuvent pas couvrir ces présentations et discussions qui se déroulent en privé. La présence des médias n’est permise aux assemblées plénières de la CÉCC que de courts moments, soit habituellement la première journée et la moitié de la seconde.