Entre 2013 et 2015, tant l’État québécois que l’Église catholique «ont simultanément entrepris de se questionner sur la situation des familles», ont fait observer les membres de l’Observatoire Jacques-Grand’ Maison lorsqu’ils ont été entendus par la Commission citoyenne sur le droit de la famille le mercredi 27 juin 2018.
Les quatre membres de ce groupe de réflexion, qui ont la particularité d’avoir obtenu leur licence en théologie en avril 1967 et d’avoir été ordonnés prêtres un mois plus tard, notent que c’est en avril 2013 que le gouvernement a créé un Comité consultatif sur le droit de famille afin de s’assurer que la législation québécoise répond adéquatement aux besoins de la famille d’aujourd’hui. À Rome, au début d’octobre 2013, c’est au tour du pape François d’annoncer la convocation d’un premier synode des évêques sur la famille puis d’un second sur la mission de la famille dans l’Église et dans le monde moderne. Cette deuxième rencontre des évêques, en 2015, se déroule un peu après que le Comité québécois, présidé par le professeur de droit Alain Roy, ait déposé un volumineux rapport final.
Dans les deux cas, déplore l’Observatoire Jacques-Grand’ Maison, les applications concrètes de ces exercices de réflexion, québécois et catholiques, sont plutôt minces. Le gouvernement n’a pas donné de suite tangible aux 82 recommandations du Rapport Roy tandis que les deux synodes ne suscitent pas «une évolution marquante et significative de la gouvernance doctrinale et canonique de l’Église chez les évêques en comparaison des attentes du pape, d’intellectuels et de pasteurs progressistes».
Parce que le gouvernement n’a pas bougé dans ce dossier, la Chambre des notaires a créé cette Commission citoyenne sur le droit de la famille, coprésidée par le professeur Roy qui s’est dit déterminé à publier un nouveau rapport avant le scrutin du 1er octobre afin que «le droit de la famille s’invite dans les élections».
C’est devant ses huit commissaires, réunis pour leur dernière audition, qu’ont témoigné hier à Montréal trois des quatre membres de l’Observatoire Jacques-Grand’ Maison. Leur porte-parole, Maurice Vanier, ex-maire de Pointe-aux-Trembles et prêtre retraité, a vivement déploré «l’inertie en faveur du statu quo émanant de nos dirigeants de l’institution catholique québécoise et de leurs services de pastorale familiale» qui n’ont pas daigné participer à cette consultation publique.
L’abbé Vanier a aussi dénoncé «les comportements de prêtres pédophiles et la légèreté tout à fait irresponsable de leurs supérieurs dans le traitement tant des oppresseurs que dans celui des jeunes victimes et leurs parents».
«Nous ne pouvions pas aborder la protection de l’enfance et de la jeunesse au Québec sans aussi avouer aussi notre gêne devant ces faits criminels pour lesquels de nombreuses poursuites judiciaires ont cours actuellement et constituent un embarras pour nos dirigeants ecclésiastiques». Cela «explique probablement leur discrétion en matière d’un appui fort à la reconnaissance spécifique des droits de l’enfant», a-t-il lancé.
Pour les membres de cet observatoire, nommé en l’honneur du prêtre, théologien et sociologue Jacque Grand’Maison décédé en 2016 et qui fut notamment leur professeur, «la réforme attendue du droit familial québécois telle qu’élaborée par le Comité consultatif sur le droit de la famille et soutenue par la Chambre des notaires du Québec» est importante et doit être appuyée par les citoyens.
«Son essentialité demeure incontournable dans le prochain agenda gouvernemental», ont-ils conclu.