Sur le parvis de l’église Sainte-Famille de Cap-Santé, François Legault, chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), a annoncé samedi que si son parti formait le prochain gouvernement, le patrimoine religieux serait mieux protégé.
Une somme de 25 M $ serait dorénavant versée chaque année pour la sauvegarde et la restauration des lieux de culte québécois ou encore pour appuyer des projets de conversion d’églises qui ferment leurs portes, a-t-il promis.
À la veille du déclenchement de la présente campagne électorale, le gouvernement, dirigé par le libéral Philippe Couillard, avait annoncé que la sauvegarde du patrimoine religieux recevrait une enveloppe de 15 M$ en 2018-2019, soit 3 M$ de dollars de plus que l’année précédente. En 2016, le gouvernement du Québec avait versé 10 M$ pour la restauration de 51 bâtiments à caractère religieux.
Un gouvernement de la CAQ va «rétablir le financement pour la restauration du patrimoine culturel à caractère religieux à 20 M$ par année». François Legault promet aussi de créer «un fonds de soutien à la conversion des églises doté d’une enveloppe de 5 M$». Cette somme va «appuyer les projets de diversification des activités ou de transformation d’églises», à la condition qu’elles demeurent au service de la communauté.
«Il faut redonner vie à nos églises, leur trouver de nouvelles vocations au besoin, mais il faut les conserver. Notre patrimoine religieux, c’est une partie de notre mémoire collective», a déclaré François Legault, aux côtés des candidats des circonscriptions de Portneuf et de Champlain, Vincent Caron et Sonia LeBel.
Encore insuffisant
Économe au diocèse de Valleyfield, Gilles Lavigne estime que les sommes versées par le Parti libéral du Québec ou encore promises par la Coalition avenir Québec sont insuffisantes tant les demandes de restauration sont nombreuses. «Il y a toujours plus de demandes que de budgets disponibles», lance M. Lavigne qui siège à une Table de concertation qui examine les demandes reçues des responsables de lieux de culte de trois diocèses, dont celui de Valleyfield.
Même son de cloche du côté de Jocelyn Groulx, directeur du Conseil du patrimoine religieux du Québec (CPRQ), qui révèle qu’en 2018 les demandes reçues par son organisme, qui administre les subventions versées par le gouvernement, ont atteint la somme de 40 M$.
«On ne peut que se réjouir que plus d’argent soit investi dans le patrimoine religieux», dit Mgr Noël Simard, président de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec. «Mais les sommes supplémentaires ne représentent qu’une goutte d’eau par rapport aux besoins».
«Le Québec a surtout besoin d’une réflexion en profondeur sur le patrimoine religieux, bien au-delà des considérations partisanes. C’est souhaité par tous les diocèses depuis longtemps», dit l’évêque de Valleyfield.
«Il ne faut pas seulement faire des offres au moment des élections. Il faut ensemble se demander comment sauvegarder une partie importante de notre culture et de notre patrimoine.»
La campagne électorale a toutefois été l’occasion, ajoute Jocelyn Groulx, de «présenter nos attentes aux principaux partis politiques». Le CPRQ a demandé «une bonification du budget accordé au patrimoine religieux».
Églises fermées
«Il faut corriger l’erreur des libéraux, qui ont coupé 10 M$ dans le patrimoine religieux en 2009 et qui n’ont jamais pleinement rétabli le financement depuis», a déclaré François Legault samedi. Il a expliqué que cette coupure «a accéléré la détérioration de nos églises et autres lieux de culte».
Mais des observateurs ont sursauté en lisant, dans le communiqué de presse remis par la CAQ, qu’il y a un lien direct entre cette coupure et le fait que «plus de 450 églises ont fermé leurs portes entre 2003 et 2016».
«Là, monsieur Legault charrie un peu», s’est exclamé l’économe diocésain Gilles Lavigne.
Il ne conteste pas le nombre de 450 fermetures. Mais il estime qu’on ne peut pas affirmer que les difficultés financières soient les seules responsables de la fermeture des lieux de culte.
«Dans bien des cas, il n’y a plus personne à l’église», admet-il. Il donne l’exemple d’une paroisse rurale de son diocèse où «Il n’y avait plus que quinze personnes à la messe le dimanche».
«Je ne sais pas combien d’églises ont fermé leurs portes», ajoute Mgr Noël Simard. «Mais ce que je sais, c’est que ce n’est pas seulement à cause de questions financières. Les raisons des fermetures sont multiples.» Il mentionne le manque de personnel et de prêtres. Il note aussi que les membres des communautés paroissiales sont de moins en moins nombreux et qu’ils peinent dorénavant à subvenir aux besoins de leur lieu de culte.
Aucun autre parti politique n’avait évoqué, jusqu’à samedi, le patrimoine religieux durant la campagne électorale. Le gouvernement du Québec a toutefois publié en juin 2018 une politique culturelle qui entend notamment «soutenir les communautés qui se mobilisent en faveur de la protection, de la transmission et de la mise en valeur du patrimoine culturel à caractère religieux». On allouera 15 M$ à ces fins durant les cinq prochaines années.