Cette année, en raison de la pandémie, la Pâque juive «sera bien différente», reconnaît le Conseil des rabbins de Montréal dans une déclaration publique adressée aux membres de toutes les congrégations juives.
Habituellement, lors de Pessa’h – la Pâque juive, une fête qui dure 8 jours – «nous nous rassemblons autour de la table en famille, entre amis et même avec des étrangers». Lors du séder, le repas cérémonial qui se déroule le premier ou les deux premiers soirs des fêtes, «on raconte l’histoire de notre libération, on mange, on boit, on chante, on pose des questions et on offre des réponses», rappelle le Conseil.
Mais en 2020, distanciation sociale et pandémie affecteront les pratiques habituelles de la Pâque juive, qui ne peut être célébrée qu’avec la famille immédiate. «Les rassemblements avec des étrangers sont strictement interdits cette année et seuls ceux qui vivent sous le même toit peuvent participer au séder», décrètent d’une seule voix tous les rabbins de Montréal. «Nous ne devons pas inviter des amis ou des parents et nous ne pouvons pas visiter la famille ou les amis.»
«Je reconnais que notre message aux communautés est bien déprimant», note la rabbin Rachel Kohl Finegold, de la synagogue Shaar Hashomayim, la présidente du Conseil des rabbins de Montréal. «On s’est même demandé si on devait pas débuter notre message de manière plus positive.»
«Mais la réalité, c’est que tous, nous vivons une situation très difficile.»
Nombreuses questions
Depuis le début de cette crise sanitaire, les rabbins sont interpellés par des membres de leurs congrégations au sujet des rassemblements religieux. À l’approche de Pessa’h, qui débute dans la soirée du mercredi 8 avril, les questions sont encore plus nombreuses tant cette fête est importante pour tous les Juifs. «Et si on invitait seulement les grands-parents? Juste un membre de la famille qui sera seul pour célébrer la Pâque?»
«Notre réponse, c’est non», tranche la rabbin Kohl Finegold, une des premières femmes du judaïsme orthodoxe à avoir été ordonnée.
«C’est certain, les gens sont très déçus de devoir célébrer la fête de la Pâque, cette année, seuls ou avec leur famille immédiate», dit-elle. «Mais aussi difficile que cela puisse être, nous devons suivre les directives des experts en santé publique.»
Ne pas suivre leurs consignes «mettrait davantage de personnes à risque de contagion». Une seule personne est atteinte «et vous vous retrouvez ensuite avec douze nouveaux cas», dit la rabbin.
Des alternatives
Cette année, «il sera encore plus important de contacter nos parents et les membres de notre communauté en prévision du séder», recommande le Conseil des rabbins de Montréal. «Rappelons-nous les heureux souvenirs que nous partageons et les nombreuses Pâques que nous espérons encore passer ensemble dans l’avenir.»
Dans leur déclaration, les rabbins montréalais indiquent aussi qu’il existe plusieurs guides pratiques qui décrivent comment faire une Pâque minimaliste.
Toutefois, sur l’usage de la technologie afin de contrer l’isolement, on suggère de «suivre les conseils de votre rabbin». C’est que des juifs très religieux n’utilisent pas l’électricité lors du sabbat, explique le professeur Pierre Anctil, un spécialiste du judaïsme montréalais et auteur, entre autres, du livre Histoire des Juifs du Québec (Boréal, 2017).
Dans certaines communautés, «ce n’est pas jugé approprié d’utiliser la technologie ou des moyens qui sont contraires aux pratiques permises durant le sabbat». En fait, précise-t-il, «ce n’est pas la technologie qui fait problème» parce qu’on peut sen servir les autres jours de la semaine. «Mais quand il est question du jour du sabbat, des gens s’abstiennent, par exemple, d’allumer ou d’éteindre une source d’électricité.»
À la synagogue Shaar Hashomayim, où travaille la rabbin Kohl Finegold, on recommande d’utiliser la technologie Zoom afin de participer à un séder virtuel, dès 18 heures, au premier jour de la Pâque.
Tout en se préparant «à célébrer la Pâque dans l’ombre de la pandémie», les rabbins montréalais recommandent d’«assurer le bien-être de tous les citoyens de Montréal par l’observation rigoureuse des directives de santé publique et la distanciation sociale».
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