Après des mois d’attente, l’ordination du nouvel évêque de Rouyn-Noranda aura lieu vendredi soir.
L’ordination épiscopale de Mgr Guy Boulanger, nommé à la tête du diocèse de Rouyn-Noranda par le pape François le 31 janvier 2020, devait initialement avoir lieu en mars. Mais la pandémie a forcé le report de l’événement et créé une étrange situation où Mgr Boulanger a été installé comme évêque en mars sans avoir été ordonné.
«Je partais de Sherbrooke le 19 mars au matin, se remémore Mgr Boulanger. La pandémie évoluait de jour en jour. Nous nous dirigions vers une ordination où peu de personnes auraient été présentes.»
Puis un appel est arrivé de Rome. C’était le cardinal québécois Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques.
«Le cardinal Ouellet a appelé lui-même pour nous inviter à reporter l’ordination. Et il a proposé une prise du diocèse même sans l’ordination, ce qui est plutôt inhabituel mais possible. Il a fait valoir que l’arrivée d’un nouvel évêque est un événement dont on ne veut pas priver l’Église.»
Mgr Boulanger s’est donc retrouvé dans une période où il agissait comme évêque, mais avec certaines restrictions.
«Comme je n’étais pas ordonné, je ne pouvais pas faire de messe chrismale ou d’ordinations. Mais aucune ordination n’a été reportée en raison de cela. Je pouvais confirmer, mais pas mandater d’autres personnes pour le faire», précise-t-il.
Découvrir un nouveau milieu
Cette période lui a permis de mieux connaître son nouveau diocèse qui, a bien des égards, vivait encore le deuil de Mgr Dorylas Moreau. Très malade, ce dernier a démissionné en juin 2019 et est décédé en octobre.
«Ma devise épiscopale, ‘Tu me devances’, tirée du Psaume 138, est montée assez spontanément dans les heures qui ont suivi mon premier contact avec le diocèse. J’ai aussi senti le deuil de Mgr Moreau et le désir d’avoir un nouveau pasteur. J’imaginais aussi les grandes routes, je voyais le Seigneur me devancer là-dedans», confie Mgr Boulanger.
Lorsqu’il a reçu l’appel du nonce apostolique – le représentant du Saint-Siège au Canada – pour lui annoncer qu’il était nommé évêque, il fut justement question des grandes et longues routes de ce «diocèse du nord», encore «assez jeune», puisque son érection canonique date de 1973.
«Une bonne part du diocèse est rurale, ce qui me sied bien puisque je viens moi-même d’un milieu rural, étant originaire de Sainte-Cécile-de-Whitton, en Estrie. Il y a une proximité et une fraternité dans ces milieux. On sent partout un engagement pour l’Église grâce à cette proximité», poursuit Mgr Boulanger.
Visiblement admiratif de «l’ouverture» qu’il rencontre dans son nouveau milieu, il n’a que de bons mots pour son équipe de collaborateurs clercs et laïcs. Le diocèse compte 19 prêtres, dont 15 lui sont directement rattachés. Le diaconat permanent est une réalité nouvelle, puisque les deux premiers diacres de l’histoire du diocèse ont été ordonnés en décembre dernier. À cela s’ajoute des agents de pastorale – 14 femmes et un homme.
«J’avais rencontré pratiquement tous ces gens dans un seul après-midi en février après ma nomination! En rétrospective, et compte tenu des mois qui allaient suivre, ce fut une chance d’avoir ce contact réel dès le départ», dit-il.
Il découvre une région qui est «habituée à accueillir» des gens de l’extérieur, qu’ils soient du Québec ou d’ailleurs. Et si les rencontres ont surtout été virtuelles depuis le mois de mars, il commence à pouvoir voir davantage de personnes en chair et en os. Il a célébré sa première messe devant des fidèles de son diocèse il y a à peine deux semaines, puisque la réouverture des lieux de culte en juin coïncidait avec le début de ses vacances.
Les défis de l’Église
Mgr Boulanger reste prudent dans l’évaluation des défis qui l’attendent, faisant valoir une connaissance encore «trop limitée» du diocèse. Loin de vouloir se transformer en gestionnaire de la décroissance, il assure qu’il n’a pas l’intention de supprimer des communautés. «Mais il faut que l’engagement soit suffisant», modère-t-il. «On cherche à avoir une pastorale plus missionnaire pour rejoindre les gens.» Il envisage d’ailleurs d’inciter les catholiques à élaborer des projets avec d’autres acteurs de la société.
«Comme Église, on aura à s’amener à la défense des plus pauvres, des gens dans le besoin, dit-il. Le message de l’Évangile a des conséquences concrètes. L’Église a une crédibilité moins grande qu’elle n’avait. Il faut être humble. Mais on peut rebâtir une crédibilité et montrer son utilité.»
Il voit à Rouyn-Noranda – comme à bien d’autres endroits au Canada – un enjeu de relève presbytérale et de personnel laïque. Il se cherche présentement un nouveau vicaire général, mais réalise que tous les prêtres du territoire ont déjà beaucoup d’engagements. Le diocèse compte deux séminaristes, dont un Colombien.
Mgr Boulanger évoque aussi son désir d’approfondir les liens avec les communautés autochtones. Il s’agira d’une expérience nouvelle pour lui, puisqu’il n’avait pas l’occasion de le faire lorsqu’il était dans l’archidiocèse de Sherbrooke.
Vendredi soir
L’ordination de vendredi soir pourra rassembler 160 personnes – la limite possible pour respecter la distanciation à l’intérieur de la cathédrale Saint-Joseph de Rouyn-Noranda. C’est cependant nettement plus que si l’ordination avait eu lieu au début du printemps, alors qu’il aurait fallu limiter la célébration à 27 personnes. Dans l’assemblée, il pourra notamment miser sur la présence de ses frères et de sa sœur.
Il profitera de l’occasion pour exhiber ses nouvelles armoiries. Elles seront présentées dans le livret d’ordination. Elles comprennent notamment des références à saint Michel – pour son diocèse d’origine, celui de Sherbrooke–, à saint Joseph – pour celui de Rouyn-Noranda, et à la bienheureuse Marie-Léonie Paradis, la fondatrice des Petites Sœurs de la Sainte-Famille dont les restes se trouvent à l’intérieur de la cathédrale Saint-Michel de Sherbrooke.
L’ordination épiscopale de Mgr Guy Boulanger sera retransmise en direct via YouTube. Elle aura lieu le vendredi 28 août, à 19 h. Le consécrateur sera Paul-André Durocher, archevêque de Gatineau. Les co-consécrateurs seront Luc Cyr, archevêque de Sherbrooke, et Gilles Lemay, évêque du diocèse d’Amos qui a été administrateur apostolique de Rouyn-Noranda de juin 2019 à mars 2020.
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