Le pasteur Paul Mukendi est toujours en fuite. Depuis le vendredi 20 août, un mandat d’incarcération a été émis contre « l’apôtre de la Ville de Québec », comme ses fidèles du Centre évangélique Parole de Vie le surnomment.
« Une enquête est présentement en cours afin de localiser M. Mukendi », confirme Étienne Doyon, porte-parole du Service de police de la Ville de Québec, sans donner plus de détails afin de afin de « ne pas nuire à l’enquête policière et pour des raisons d’efficacité ».
Le 29 juin 2019, au terme d’un procès devant un jury qui a duré près de trois semaines, le révérend Paul Mukendi Wa Bukole a été reconnu coupable de neuf chefs d’accusation, dont agression sexuelle, exploitation sexuelle et voies de fait simples ou armées contre une membre de son Église, alors mineure lorsque les premiers crimes auraient été commis. Le 27 février 2020, le juge Jean-François Émond a condamné le pasteur à huit ans de détention. Ses avocats ont aussitôt porté en appel cette sentence. Mais il y a une semaine, un juge de la Cour d’appel a rejeté leur demande et a ordonné que le révérend se rende aux autorités au plus tard le 20 août.
Vendredi, il ne s’est toutefois pas présenté. Un mandat d’incarcération a aussitôt été émis contre lui, explique Me Audrey Roy-Cloutier, porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP). Cela permet « aux forces de l’ordre de l’interpeller et de le conduire aux autorités carcérales ».
Mardi, le DPCP a fait savoir que de nouvelles accusations venaient d’être déposées contre Paul Mukendi, « soit désobéissance à une ordonnance du tribunal et liberté illégale ».
« Un mandat d’arrestation a été obtenu et s’ajoute au mandat d’incarcération déjà en vigueur. Les policiers peuvent l’arrêter partout au pays », a déclaré Me Roy-Cloutier.
Culte de vérité
Dimanche, le Centre évangélique Parole de Vie de Vanier a tenu un « grand culte de vérité » où, disait-on, « tout serait dévoilé sans détour ». Durant deux heures, des fidèles, dont l’épouse du pasteur, ont expliqué que Paul Mukendi n’a pas fui la justice mais qu’il a plutôt été contraint de fuir devant l’injustice et la persécution.
« Je sais que l’apôtre Paul est vivant et qu’il est en santé », a lancé, dès le début du culte, un responsable de la section jeunesse de l’Église, Pierrick Tardif, tout de blanc vêtu.
« Je ne sais pas où il est », a-t-il ajouté. « Est-il à Toronto ? À Vancouver ? Je ne sais pas. Mais je sais qu’il est vivant. » Plusieurs « Amen » ont alors fusé des fidèles réunis dans les locaux de l’Église.
Le révérend Paul Mukendi « avait tous les droits de fuir », a ensuite déclaré le pasteur Cedric Malayi. S’il a « décidé de s’enfuir », c’est qu’il est « persécuté à cause de l’Évangile ».
« Quand le système est contre toi, fuis. Quand ta mission est en danger, fuis », a-t-il ajouté. « Je sais, moi, que tu es innocent. Dieu sait que tu es innocent. Même tes accusateurs savent que tu es innocent. »
Église indépendante
Le Centre évangélique Parole de Vie n’est pas membre de l’Association d’Églises baptistes évangéliques au Québec (AEBEQ). « C’est une Église indépendante, qui fait partie du grand parapluie évangélique québécois, mais qui n’est pas imputable devant ses pairs et qui fait la pluie et le beau temps », déplore le pasteur Louis Bourque, le directeur général de l’AEBEQ, bien au fait de la condamnation récente et de la fuite du pasteur de Vanier.
De tels gestes « donnent mauvaise presse » aux Église évangéliques, membres ou non de l’AEBEQ. « C’est pathétique », dit-il.
« Quand des gens utilisent le nom de Dieu et posent des gestes immoraux ou malhonnêtes, c’est pire que n’importe qui dans la société. C’est carrément inacceptable d’associer de telles actions au nom de Dieu », tranche-t-il.
Le pasteur évangélique Louis Bourque n’a que deux conseils à donner au fugitif Paul Mukendi. « Non seulement qu’il se rende aux autorités policières mais aussi qu’il démissionne » de son poste de dirigeant du Centre évangélique Parole de Vie.