Les évêques canadiens ont entrepris cette semaine, lors de leur assemblée plénière tenue à huis-clos, un « discernement concernant la guérison et la réconciliation avec les peuples autochtones ». Mais pour le juge à la retraite George Valin, un catholique pratiquant, cela est nettement insuffisant.
L’homme de loi, un juge durant 28 ans à la Cour supérieure de l’Ontario, veut que les évêques, durant leur rencontre annuelle qui se termine le vendredi 24 septembre 2021, invitent officiellement le pape François à venir au Canada.
Cette demande, le juge Valin la répète sur toutes les tribunes depuis la découverte de tombes non identifiées sur les terrains d’anciens pensionnats autochtones de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan et gérés par des institutions catholiques.
De nombreuses voix se sont élevées depuis pour rappeler aux autorités catholiques du Canada qu’elles n’avaient toujours pas répondu à l’appel à l’action 58 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR).
Les commissaires demandaient spécifiquement au pape de « présenter, au nom de l’Église catholique romaine, des excuses aux survivants à leurs familles ainsi qu’aux collectivités concernées pour les mauvais traitements sur les plans spirituel, culturel, émotionnel, physique et sexuel que les enfants des Premières Nations, des Inuits et des Métis ont subis dans les pensionnats dirigés par l’Église catholique ».
« Le protocole, dans l’Église catholique, veut qu’un pape ne se rende dans un quelconque pays à moins d’y avoir été préalablement invité par la conférence épiscopale de ce même pays », rappelle le juge à la retraite George Valin.
Déjà, en 2019, il avait échangé des lettres avec le président d’alors de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC), Mgr Lionel Gendron. L’évêque de Saint-Jean-Longueuil lui avait même répondu que les évêques planifiaient, « depuis 2016 et avec un zèle renouvelé » – des mots qu’il répètera plusieurs fois durant notre entretien téléphonique – une visite papale au Canada.
Pour le juge à la retraite, il ne fait aucun doute que « si le pape François n’est toujours pas venu au Canada, c’est tout simplement parce que les évêques canadiens ne l’ont jamais officiellement invité ».
La CECC a révélé, le 10 juin 2021, qu’elle planche depuis deux années déjà, non pas sur une visite papale, mais sur l’envoi, au Vatican, d’une délégation d’Autochtones, formée d’aînés, de chefs et de survivants des pensionnats en décembre 2021. « Ce fut une surprise pour moi d’apprendre cela. Il n’a jamais été question d’une délégation au Vatican dans mes échanges avec Mgr Gendron », réagit-il.
Dans une lettre ouverte acheminée cet été à divers médias canadiens, le juge George Valin ainsi que Maurice Switzer, un membre de la Première Nation Mississaugas d’Alderville qui siège au Comité consultatif sur la réconciliation de la Commission ontarienne des droits de la personne, ont questionné l’envoi de cette délégation.
« Les leaders autochtones ont le droit de savoir pourquoi les évêques canadiens ont collectivement invité le pape Jean-Paul II à visiter le Canada en 2002, afin de participer à la Journée mondiale de la jeunesse, mais qu’ils se montrent incapables ou non désireux d’inviter le pape François à venir au Canada pour présenter des excuses, attendues depuis longtemps, sur l’un des chapitres les plus sombres de notre histoire », tant canadienne que catholique.
Selon les deux auteurs, les dirigeants autochtones devraient répondre au pape François « que l’acceptation de son invitation à se rendre au Vatican en décembre prochain est conditionnelle à l’adoption préalable par la CECC, lors de son assemblée plénière, d’une proposition invitant le pape à venir au Canada ».