Un collectif d’individus et d’associations religieuses et laïques a lancé le 5 septembre à l’Église unie St-James de Montréal la campagne Non à la loi 21.
Cette campagne, qui se déroulera jusqu’au dimanche 6 octobre, invite les gens à épingler à leur chemise ou à leur manteau un macaron – on veut en fabriquer et en distribuer pas moins de 50 000 – qui montre leur opposition à la loi sur la laïcité de l’État adoptée cet été par le gouvernement de François Legault. Les citoyens sont aussi invités à porter publiquement un signe ou un symbole religieux de leur choix.
Ehab Lotayef, l’un des coordonnateurs de la campagne, un musulman qui portera une kippa durant le mois de septembre, regrette que les députés de l’Assemblée nationale aient adopté cette loi malgré l’opposition de bien des citoyens.
«Même si c’est devenu une loi, nous ne resterons pas silencieux. De nombreuses lois injustes ont existé et elles ont été annulées», a-t-il lancé, convaincu que, dans quelques années, le gouvernement du Québec s’excusera auprès des citoyens qui ont été brimés par les dispositions de cette loi.
Présente à la conférence de presse, la commissaire indépendante Violaine Cousineau a tenu des propos semblables. Elle a rappelé qu’il y a «cinquante ou soixante ans, on a fait vivre une telle situation aux Autochtones et on le regrette amèrement aujourd’hui. On s’excuse publiquement d’avoir rasé les têtes des Autochtones. Et on est en train de faire exactement la même chose avec nos concitoyens des minorités culturelles.»
«Quand j’entends le premier ministre Legault dire que le dossier de la laïcité est maintenant clos, je n’arrive pas à y croire», a ajouté cette commissaire de la Commission scolaire de Montréal.
«Non, monsieur le premier ministre, nous sommes loin d’avoir tourné la page. En fait, à l’heure actuelle, des gens subissent de la violence liée à la loi 21. Ils la vivent dans leur quotidien. Ils ne peuvent plus travailler ou ils sont placés devant un choix déchirant. Pour gagner leur vie, ces gens doivent extirper une partie constituante de leur identité.»
Portant une kippa, le député libéral de la circonscription de Pierrefonds—Dollard, Frank Baylis, a déploré le fait que la loi 21 «brise trois chartes».
«Cette loi bafoue la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Charte canadienne des droits et liberté et la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.»
«Et on se demande bien pourquoi? Qu’est-il arrivé de si terrible pour que nous brisions trois chartes par une seule loi?», a-t-il demandé. «C’était simplement pour empêcher quelqu’un d’avoir un emploi à cause des vêtements de sa religion ou d’un signe religieux.»
«C’est inacceptable», a-t-il martelé dans cette église protestante, prenant l’engagement de porter l’épinglette ronde tous les jours du mois de septembre.
«Trop souvent, j’entends: « Tu peux bien retourner dans ton pays »», a ensuite déploré la militante pour la justice sociale Ronit Yarosky, aussi secrétaire du conseil d’administration de la congrégation Dorshei Emet de Hampstead.
«Je suis une Québécoise de la cinquième génération», réplique-t-elle. «Je n’ai pas d’autre pays que ce pays.»
«Je comprends bien votre inquiétude par rapport aux religions. Mais nous ne voulons pas vous convertir», dit-elle. «Nous voulons tout simplement vivre avec vous, chez nous, chez moi, et avoir les mêmes chances que vous.»
«Ne remplaçons-nous pas l’extrémisme religieux par l’extrémisme de la laïcité? Les extrêmes excluent et divisent toujours», a-t-elle déclaré lors de la conférence de presse.
Le dimanche 6 octobre, les membres du collectif Non à la loi 21 entendent organiser une grande action publique qui n’a toutefois pas été précisée.
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