Des dirigeants catholiques du Cameroun ont exhorté les fidèles à la prière, après qu’on ait repêché le corps de l’évêque de Bafia, Mgr Jean-Marie Benoît Bala, dans les eaux du Sanaga, un fleuve du centre du pays, le 2 juin. Homicide ou suicide? Plusieurs questions restent toujours sans réponse.
«C’est une catastrophe pour le Cameroun, et plus encore pour notre Église catholique», lit-on dans un communiqué mis en ligne sur le site web de conférence épiscopale camerounaise.
«Nous témoignons de notre confiance envers les personnes qui assisteront le gouvernement et l’Église dans cette enquête cherchant à faire lumière sur les causes du décès de cet homme de Dieu, reconnu comme une personne posée, réfléchie, sage, patiente et affable et de qui nul n’avait à redire» ajoute le communiqué.
C’est Mgr Samuel Kleda, archevêque de Douala et président de la conférence épiscopale, qui a identifié le corps de Mgr Bala. Il était accompagné de son confrère Jean Mbarga, archevêque de Yaoundé. Le corps flottant du prélat de 58 ans a été découvert par un pêcheur, sur les eaux du fleuve Sanaga, non loin de Monatélé, dans le centre du pays.
Selon la conférence épiscopale, Mgr Bala serait disparu de son domicile le 31 mai, dans des circonstances qui demandent à être «clarifiées». L’Église catholique camerounaise espère avoir bientôt des réponses sur cette «mort horrible et bouleversante».
Le 6 juin, l’Agence panafricaine de presse (APP), basée à Dakar, au Sénégal, a remis en question la thèse du suicide, citant à ce sujet des sources policières et judiciaires. Selon l’APP, le procureur-général du Cameroun a demandé aux policiers d’enquêter sur cette affaire et de faire la lumière sur la «mort suspecte» du prélat.
Ordonné en 1987, Mgr Bala a été nommé évêque de Bafia, en 2003, par Jean-Paul II, après avoir exercé son ministère à titre d’aumônier scolaire et de recteur d’un séminaire.
Note retrouvée dans le véhicule
Selon le Journal du Cameroun, le Land Cruiser de l’évêque a été retrouvé le 1er juin, sur un pont de Yaoundé, la capitale du Cameroun. On aurait retrouvé sur l’une des banquettes du véhicule les cartes d’identité du prélat, de même qu’une note manuscrite sur laquelle on peut lire: «Je suis dans l’eau».
Selon divers reportages, le corps de Mgr Bala a été retrouvé sur le fleuve Sanaga, à une quinzaine de kilomètres en aval de la capitale. Le prélat était une figure charismatique et appréciée des fidèles, dans le diocèse de Bafia, où l’on saluait son «souci et sa sollicitude» pour les malades et les pauvres.
Selon l’abbé Rémy Ngomo, prêtre du diocèse de Bafia, Mgr Bala semblait être «préoccupé et souffrant» lorsqu’il l’a vu pour la dernière fois, à la fin du mois de mai. Il était, dit-on, «atterré» par le décès récent mais suspect de Mgr Armel Collins Ndjama, directeur du grand séminaire de son diocèse. Ce dernier a été retrouvé sans vie, dans sa chambre, le 10 mai dernier.
«Nous invitons tous les amis de l’Église, chrétiens ou non, à faire preuve de sérénité, de paix d’esprit, d’espérance et de charité, et de résister à la tentation du d’émettre des jugements ou de susciter la polémique», ajoute l’abbé Ngomo.
Le 6 juin, un reportage de l’agence Camernews a toutefois laissé entendre que Mgr Bala aurait peut-être été torturé. Selon le rapport du médecin légiste, le corps du prélat présentait des «signes de torture» et qu’il a vraisemblablement été tué, puis jeté dans le fleuve.
L’Église catholique du Cameroun est formée de 24 diocèses. La population du pays (20.4 millions d’habitants) est catholique à 38%, protestante à 26% et musulmane à 21%, selon des données colligées dans le rapport sur la liberté religieuse du Département d’État des États-Unis.
En 2014, le président camerounais Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, a signé un concordat avec le Vatican afin d’accorder un statut légal à l’Église au Cameroun.
Au cours des dernières années, les catholiques camerounais ont cependant fait l’objet de raids transfrontaliers répétés de la part des djihadistes nigérians de Boko Haram. Les miliciens islamistes ont tué des centaines de policiers, de militaires et de civils, particulièrement dans les provinces du nord du pays. C’est dans cette région qu’œuvrait la religieuse québécoise Gilberte Bussière, en 2014, lorsqu’elle a été enlevée et séquestrée par des hommes armés.
Le diocèse de Bafia est composé de 15 paroisses, dont l’animation spirituelle est assurée par 21 prêtres séculiers et 57 personnes consacrées. Des préparatifs sont en cours pour célébrer le 50e anniversaire du diocèse.
Jonathan Luxmoore