Les archevêques des deux plus importants diocèses catholiques du Canada anglais s’opposent farouchement à l’aide médicale à mourir, alternant entre furie, mises en garde et menace. Le cardinal Thomas Collins, archevêque de Toronto, et Mgr Terrence Prendergast, archevêque d’Ottawa, ont publié des lettres pastorales sur le sujet au cours des derniers jours. Alors que le gouvernement prépare sa nouvelle législation, l’archevêque d’Ottawa menace déjà les catholiques qui auront l’intention de se prévaloir des éventuelles dispositions légales qu’ils ne pourront obtenir le sacrement de l’onction des malades.
«On demandera bientôt aux médecins, à travers le pays, qui ont consacré leur vie à guérir leurs patients, de faire maintenant complètement le contraire. On ne leur demandera plus d’atténuer les souffrances de leurs patients en fournissant un traitement et des soins attentionnés, mais en les condamnant à mourir. En fait, tuer un patient ne sera plus considéré comme un crime, mais plutôt comme des services médicaux appuyés et réglementés par la législation», affirme le cardinal Collins, dans sa lettre.
Aux yeux de l’archevêque de Toronto, les recommandations émises par le comité parlementaire sur l’aide médicale à mourir «devraient nous ébranler au plus profond de nous-même».
Le comité parlementaire propose d’envisager l’aide médicale à mourir pour des mineurs et des personnes psychiatrisées. Il demande également d’élaborer des lignes directrices afin que les personnes atteintes de démence puissent planifier leur propre mort. Et qu’on permette aux médecins qui refusent de donner la mort à leurs patients de référer ces dossiers-là à leurs collègues.
Le cardinal Collins est profondément outré par cette recommandation du comité: «Aucun autre pays dans le monde n’exige une telle violation de [la liberté de] conscience» des médecins, ajoute-t-il.
«Il est injuste de forcer les gens à agir contre leur conscience dans le but d’obtenir le droit de pratiquer comme médecin, ou dans le cas d’un établissement de soins de santé, de pouvoir se qualifier pour des subventions gouvernementales», ajoute le cardinal torontois. Cela est contraire à la politique de tolérance qui prévaut au Canada à l’égard de la diversité religieuse. Plus encore, ajoute-t-il, c’est une forme de «discrimination religieuse qui punit ceux qui servent si fidèlement tous ceux qui viennent à eux, comme ils l’ont toujours fait […] mais qui, en toute conscience, ne peuvent effectuer certaines procédures, comme aider à tuer leurs patients.»
Le cardinal Collins a invité les catholiques canadiens à se joindre à la Coalition for Healthcare and Conscience. Ce groupe de pression pancanadien fédère des dizaines d’organismes, dont au moins quatre sont ouvertement catholiques.
«Tout en gardant présente à l’esprit la dignité intrinsèque de chaque personne, c’est le temps pour les familles à travers le pays d’avoir une conversation certes difficile mais nécessaire au sujet de la réalité de la mort. Nous devons comprendre les implications destructives de ces changements légaux et offrir des alternatives liées davantage à l’amour et la miséricorde», conclut l’archevêque de Toronto.
Pression politique
L’archevêque d’Ottawa, Mgr Terrence Prendergast, a quant à lui invité les catholiques canadiens à exercer des pressions sur leurs élus provinciaux ou fédéraux.
Il a aussi exhorté ses diocésains à sensibiliser leurs proches aux enjeux moraux liés aux soins de fin de vie: «Parle[z] à vos amis et collègues de travail de cette menace grave à la dignité humaine et à la vie que représentent l’euthanasie et le suicide assisté pour nos voisins les plus vulnérables. Explique[z] l’importance de respecter la vie humaine de la conception jusqu’à la mort naturelle à vos enfants, à vos petits-enfants, à vos amis et à vos collègues».
«Coopérer dans la mise à mort de personnes handicapées, fragiles, malades ou souffrantes, même si motivé par une compassion déplacée, suppose que l’on ait déjà jugé que telle ou telle vie n’a pas de valeur, qu’elle n’est pas digne d’être vécue», note Mgr Pendergrast. Or, ajoute-t-il, «toute vie humaine a une valeur. La loi devrait [donc] protéger toute vie. Personne ne perd son droit à la vie en raison d’une maladie ou d’une invalidité».
Peu après la publication de sa lettre pastorale, Mgr Pendergrast a affirmé aux journalistes que les catholiques prévoyant avoir recours à l’aide médicale à mourir ne pourront obtenir le sacrement de l’onction des malades. Les prêtres œuvrant en milieu hospitalier pourront évidement visiter et prier pour les malades en phase terminale, tout en s’efforçant de les dissuader d’avoir recours à l’aide médicale à mourir.
Catholic News Service
Trad. et adapt. F. Barriault, pour Présence