La Porte sainte de la basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec a été rouverte samedi soir à l’occasion du Jubilé de la miséricorde. Immédiatement après la célébration, des centaines de personnes se sont empressées d’aller la franchir.
À 16h, le cardinal Gérald Lacroix, archevêque de Québec, est sorti en procession le long de la cathédrale, à l’extérieur. Vêtu d’une cape violette, coiffé de sa mitre, il s’est avancé vers la foule.
Mais ni le faste des vêtements ni l’ambiance solennelle n’allaient empêcher le cardinal d’entreprendre la soirée avec humour, lorsqu’il a lancé aux gens se tenant debout sur le trottoir qu’il les invitait à s’asseoir. Puis, après une prière, le cortège a poursuivi son chemin vers l’extérieur de la Porte sainte.
Là, à peine un an après avoir procédé à sa fermeture, il a poussé l’unique Porte sainte d’Amérique et s’est agenouillé dans l’embrasure, tandis que la musique résonnait dans la cathédrale bondée.
«Cette Porte Sainte, maintenant ouverte à nouveau, est un signe sensible et tangible du cœur ouvert de notre Dieu, d’où jaillit et coule sans cesse le grand fleuve de la miséricorde», a déclaré le cardinal Lacroix dans un bref commentaire homilétique. «Que tous ceux et celles qui franchiront cette porte, tout au long du Jubilé de la Miséricorde, qu’ils soient croyants ou loin de la foi, fassent l’expérience d’une rencontre qui leur permette de se laisser aimer par un Dieu qui ne désire que leur bonheur.»
Une procession s’est ensuite mise en branle depuis la chapelle du Sacré-Cœur, celle où se trouve la Porte sainte. Prêtres et évêques prenaient place dans le chœur tandis que les effluves d’encens embaumaient la cathédrale. Le cardinal Lacroix était accompagné de plusieurs évêques émérites, dont Mgr Maurice Couture, ancien archevêque de Québec. Plusieurs dignitaires siégeaient dans les premiers bancs de la nef, autour desquels un périmètre de sécurité était érigé. La premier ministre du Québec, Philippe Couillard, était présent. Le maire Régis Labeaume n’a pu rester pour la messe puisque sa fille accouchait.
Notre-Dame de Québec s’était fait belle pour l’événement tout en ajoutant un maximum de chaises pour accommoder le plus de fidèles possible. Environ 1000 personnes de tous âges se trouvaient dans l’église. Des couples âgés étaient assis à côté de jeunes familles, des immigrants à côté des résidents du quartier.
Après l’Évangile, l’homélie du cardinal Lacroix a été suivie avec attention par l’assemblée. «Joie, Paix, Sérénité! Voilà trois mots qui résument les attentes et les aspirations d’un grand nombre de nos contemporains, a dit le cardinal. Ils expriment le cœur de la Bonne Nouvelle de l’Évangile. Ce désir de vivre dans la joie, cette aspiration à la paix et à la sérénité qui traduisent le plus profond de notre être ont besoin d’être convertis. C’est pourquoi nous avons besoin de contempler le mystère de la miséricorde.»
«Au cours de cette Année Sainte, ouvrons nos yeux pour voir les souffrances du monde, les blessures de nos frères et sœurs, entendre les cris des victimes de la violence et de la guerre», a poursuivi l’archevêque de Québec avant de mentionner divers enjeux du monde actuel, dont l’environnement, l’injustice et le drame humanitaire des réfugiés. Sortant de son texte, il a alors mentionné que le premier ministre devrait peut-être quitter plus tôt puisque c’était ce soir-là que le Québec accueillait son premier avion de réfugiés syriens. L’assemblée a spontanément applaudi en entendant cette précision.
À la toute fin de la célébration, l’archevêque de Québec a posé un geste inusité: il est sorti par la Porte sainte. Habituellement, seule l’entrée dans la basilique-cathédrale est permise avec cette porte. Il voulait ainsi symboliser l’appel des chrétiens à aller à la rencontre du monde.
«Exceptionnellement, ce soir, des représentants désignés de notre communauté diocésaine seront invités à notre suite à sortir par la Porte sainte symbolisant notre envoi, exprimant ainsi une conviction profonde: ce que nous avons reçu gratuitement de Dieu, nous voulons le partager gratuitement avec nos frères et sœurs qui ont besoin de miséricorde, de tendresse, de réconciliation», a expliqué le cardinal.
Des centaines de personnes franchissent la Porte sainte
La messe n’était pas tout à fait terminée que, déjà, quelques dizaines de personnes attendaient que la grille donnant accès au côté de l’église s’ouvre afin d’être les premiers à franchir la Porte sainte.
Chantal Tremblay était la première de la file. «Je ne voulais pas manquer ça. L’an dernier, pour le 350e de la cathédrale, je n’avais pas pu la franchir et j’avais été déçue», a expliqué la dame de la région de Québec.
Plus loin, un couple de Saint-Georges, en Beauce, attendait patiemment tandis que la colonne dont il faisait partie commençait à se diriger vers la porte. «Nous passions pas hasard», ont expliqué Suzan et Valtère Pépin. Bien qu’ils n’aient pas du tout suivi le lancement de l’Année de la miséricorde à Rome ou au Québec et qu’ils se disent peu pratiquants, ils tenaient tout de même à saisir l’occasion de franchir la porte.
La file a rapidement gonflé après la messe, alors que plusieurs personnes qui étaient assises à l’intérieur sont venues l’allonger. Celle-ci se rendait du côté nord de la cathédrale – là où est située la porte – jusqu’à la rue de Buade qui la longe au sud.
Si certains se recueillaient, d’autres avaient le cœur à la fête. Des Philippins de Toronto venus en autocar expressément pour l’ouverture de la Porte sainte s’échangeaient quelques blagues en attendant leur tour. «C’était important de venir, à cause de notre foi», a répondu l’organisatrice du groupe, Marie Soriano, lorsqu’on lui a demandé ce qui avait pu la motiver, elle et les 51 personnes qui l’accompagnaient, à franchir les 800 kilomètres qui séparent les deux villes en plein mois de décembre alors que les tempêtes de neige sont habituellement monnaie courante. D’ailleurs, pour l’anecdote, puisqu’une partie de la célébration se déroulait à l’extérieur, les autorités ecclésiales avaient prévu un plan B en cas de tempête de neige.
À quelques mètres de la porte, deux jeunes hommes suivaient lentement le flot les menant jusqu’à l’intérieur de la cathédrale. Ils vivent ensemble et célébraient cette journée même leur anniversaire de mariage. «Nous avons assisté à la messe et nous voulions souligner notre anniversaire en passant la porte», ont expliqué Danny Fontaine et son conjoint qui a préféré taire son nom. M. Fontaine a laissé entendre qu’il était particulièrement rejoint par le thème du jubilé: la miséricorde.
La Porte sainte avait été scellée le 28 décembre 2014 après avoir été ouverte pendant un an pour souligner le 350e anniversaire de la plus vieille paroisse en Amérique du Nord. N’eut été du jubilé extraordinaire de la miséricorde décrété par le pape François, elle serait restée scellée jusqu’en 2025, année du prochain jubilé dans l’Église catholique.
Pendant le jubilé, tous les diocèses sont invités par le pape à désigner des «portes de la miséricorde». La Porte sainte de Notre-Dame de Québec fait donc partie des 38 «portes de la miséricorde» répertoriées dans la province.