Du 15 au 16 octobre s’est tenu à Montréal le colloque intitulé Quel avenir pour le catholicisme au Québec?. Organisé par le Centre culturel chrétien de Montréal (CCCM), les participants ont tenté de comprendre le marasme dans lequel se retrouve l’Église catholique aujourd’hui tout en se questionnant sur le futur de cette institution dans cette province où les croyants ne représentent plus que la moitié de la population.
Marilyse Lapierre, l’animatrice du colloque et membre du comité d’organisation et de programmation souligne, dans un long entretien avec Présence, que le titre et le thème du colloque n’ont pas été choisis au hasard. « En France, il y a des personnes qui se demandent si le catholicisme à un avenir. Ici, nous pouvons dire que nous sommes inquiets, mais pas désespérés », explique celle qui est aussi membre du CCCM.
Jean-Pierre Proulx, ancien journaliste du Devoir spécialisé dans les questions relevant de l’éducation et de la religion, et également membre du CCCM, rappelle que « le thème du colloque est une question qui se pose depuis 40 ans.
« La Commission Dumont, à la fin des années 70, portait sur la place des laïcs dans l’Église. Cependant ce thème a largement débordé pour parler de l’avenir de l’Église dans le Québec », souligne-t-il.
La première soirée du colloque a été consacrée à ce qui a conduit au déclin de l’Église d’ici. Le théologien Robert Mager, l’historienne Catherine Foisy et l’agente de pastorale Sylvie Carrier ont retracé les jalons historiques de l’Église catholique québécoise jusqu’à la Révolution tranquille.
Roger Mager a souligné que la collision entre le modernisme et le christianisme a affaibli l’Église catholique. Les tenants du modernisme étant partisans d’une société progressiste et d’un monde nouveau alors que l’Église catholique était davantage tournée vers l’au-delà. Pour les modernistes, l’institution est devenue au fil du temps l’ennemie à abattre.
L’historienne Catherine Foisy a rappelé le rôle politique de l’Église dès les débuts de la colonisation. Elle a souligné que l’Église catholique a perdu énormément d’importance lorsque l’État a pris la relève et entrepris de s’occuper de l’éducation et de la santé. Pourtant, l’Église a continué à jouer un rôle dans les questions sociales, surtout entre 1960 et 1980, soit avant que la pastorale sociale perde son importance au sein de l’institution.
Sondage
Lors du colloque un sondage réalisé auprès des membres de la communauté Saint-Albert, des Dominicains de Montréal, du Centre étudiant Benoit-Lacroix et des étudiantes et étudiants de l’Institut de pastorale des Dominicains a été dévoilé. Bien que n’étant pas représentatif, il permet tout de même de cerner les préoccupations d’une certaine tranche de catholiques, souligne Jean-Pierre Proulx qui a participé à son élaboration. Ce sondage a servi de point d’ancrage aux différents débats qui ont eu lieu lors du colloque.
Parmi les 87% de répondants qui ont répondu souhaiter des changements au sein de l’institution ecclésiale, 93% ont estimé que ceux-ci doivent être majeurs. Cependant seuls 44% croient possibles ces changements, tandis que 55% n’en sont pas certains.
« Il y a une espérance, cependant elle est fragile. Beaucoup de participants ont tenté des expériences par le passé et ont constaté qu’il y a eu beaucoup d’échecs. Sans doute que s’ils étaient certains que leurs efforts porteraient des fruits, ils s’engageraient davantage », commente Marilyse Lapierre.
Un des aspects qui freine l’engagement des progressistes est sans aucun doute la place de la femme au sein de l’institution, croit Jean-Pierre Proulx.
« L’égalité entre les hommes et les femmes dans l’Église est pour eux une question pivot. Traditionnellement, les femmes dans l’Église ont été plus impliquées dans la pastorale. C’est à elles, pourtant, que l’Église dit non. Les progressistes constatent les efforts de la société en ce sens, mais dans l’Église ils se font dire que l’égalité fondamentale entre les hommes et les femmes est reconnue, mais que la gouvernance c’est non. »