Un prêtre de l’archidiocèse de Sherbrooke remporte un vif succès avec les expositions virtuelles du Saint-Sacrement qu’il orchestre en direct sur Facebook et qui attirent quotidiennement l’attention de plusieurs milliers d’internautes.
L’abbé Charles Vallières, vicaire à Magog, a commencé à filmer une hostie dans un ostensoir peu de temps après le début du confinement. Avec l’aide de deux amies musiciennes, il a organisé de premières diffusions en direct. A priori, rien de bien particulier à voir: un bel objet doré immobile. À sa grande surprise, plus de 200 personnes ont répondu à l’appel. Puis le nombre de personnes regardant l’ostensoir s’est mis à augmenter continuellement.
«Quel mystère!», lance-t-il en éclatant de rire.
Il est le premier à le reconnaître: un tel succès l’étonne.
«Beaucoup de prêtres faisaient des messes. J’ai voulu faire quelque chose de différent», explique-t-il calmement. Il expose donc l’hostie en ligne du lundi au vendredi, vers 9 h 10, pendant environ 90 minutes. «J’utilisais déjà les réseaux sociaux mais ça m’a obligé à mieux les connaitre», reconnait-il.
Un «besoin»
Il n’a pas reçu de demande explicite pour exposer le Saint-Sacrement en ligne. Il dit que cela s’est d’abord manifesté chez lui comme un «besoin».
«Au début de la pandémie, on sentait la peur, les inquiétudes, remarque-t-il. Je crois que Jésus est cet homme, ce Dieu qui a été attentif aux préoccupations réelles des gens. À travers le Saint-Sacrement, il est encore là avec nous pour consoler et nous restaurer. Pour nous aider à trouver la paix profonde du cœur, même en ces temps difficiles.»
Il constate que ce sont surtout des gens du Québec qui suivent ses diffusions en direct, mais que plusieurs internautes habitent sur l’île de la Réunion, dans les Antilles ou en France.
Plus étonnants encore que l’engouement suscité, il y a les nombreux messages de prière qui défilent tout au long de la diffusion. Les internautes n’hésitent pas à écrire une intention de prière, ou un merci.
La vidéo diffusée le vendredi 15 mai a suscité plus de 7000 visionnements, 500 partages et 9300 commentaires. Celles publiées les jours précédents ont aussi généré des statistiques semblables.
Cependant, certains internautes contactent directement l’abbé Vallières. C’est notamment le cas d’un homme affligé par le récent suicide de son fils.
«Il est venu en ligne. Nous avons tous prié pour lui. Il a reçu plein de messages d’encouragement. Nous avons senti un élan de compassion», indique le prêtre. Il invite d’ailleurs les gens à partager leurs intentions de prière entre eux. «La prière peut avoir un impact dans la vie des gens et apporter une consolation.»
Un autre jour, c’est une infirmière confrontée à la réalité de la COVID-19 dans son milieu qui lui a confié s’être sentie déchargée de son angoisse et de sa peur.
«J’ai beaucoup, beaucoup, beaucoup de témoignages de personnes construites intérieurement par cette expérience de prière», confie le prêtre de 38 ans du bout des lèvres, ne voulant pas que cela passe pour de la vantardise.
Tisser des liens
Il a lui-même redécouvert sa foi à l’âge de 19 ans. Au fil des années, il a notamment cheminé auprès du Renouveau charismatique. Ordonné il y a sept ans, il a rapidement été plongé dans la réalité du terrain après la catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic. Comme aujourd’hui, les gens, même s’ils sont peu pratiquants, ont voulu se tourner vers l’église à la recherche de réconfort.
«Dans le cœur des Québécois, il reste quelque chose de la foi, croit-il. Que cela révèle-t-il de nous comme peuple? Je ne suis pas sociologue, mais je dirais qu’il y a un besoin de Dieu dans le cœur des gens qui est révélé, de manière consciente ou non.»
L’abbé Vallières trouve-t-il ironique de parler de «présence réelle» dans l’hostie alors que cette exposition se fait par pixels interposés?
«L’écran permet de communier. C’est un intermédiaire. Ça ne peut pas remplacer la vraie adoration eucharistique, dit-il. Nous utilisons les moyens que nous avons. Pensons au pape François qui a invité à une communion spirituelle les gens privés de l’eucharistie. Sur Facebook, c’est une forme de communion au Christ, mais de manière virtuelle. Cette communauté virtuelle aide à avancer, mais elle ne peut pas remplacer la proximité en personne.»
Malgré tout, l’expérience permet de tisser des liens forts entre les personnes.
«Ce temps d’adoration aide à traverser cette période. Il stimule le désir de revenir à l’église», espère-t-il.
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