«Je m’en suis procuré deux exemplaires», a annoncé la députée Françoise David à Nicole Croteau, auteure de son tout premier livre Heureux les pauvres?, lancé lundi soir à la Librairie Paulines de Montréal. «C’est un livre important. Je vais les remettre à des collègues dès la semaine prochaine.»
Heureux les pauvres? raconte le parcours d’une professionnelle qui, «au détour de la quarantaine», connaît de très sérieux ennuis de santé qui l’éloigneront du monde du travail durant plusieurs années et l’obligent à recourir à l’aide sociale.
Est-ce aux deux autres députés de Québec solidaire, sa formation politique, que Françoise David remettra ces exemplaires? Non. «Je vais les remettre personnellement, et non par messagers, au premier ministre Philippe Couillard et au ministre François Blais», a-t-elle promis à l’auteure.
François Blais est à la tête du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale. Le ministre Blais pilote actuellement une réforme de l’aide sociale à laquelle s’oppose la coporte-parole de Québec solidaire.
«Chaque gouvernement, pour connaître une heure de gloire je suppose, veut faire une réforme de l’aide sociale. Cela n’a jamais eu comme conséquence d’enrichir les personnes à l’aide sociale. C’est toujours le contraire, toujours des coupures», a lancé la députée de Gouin lors du lancement tenu dans le sous-sol de la librairie de la rue Masson.
Françoise David n’a pas hésité à rédiger la préface du livre de Nicole Croteau, une citoyenne qu’elle ne connaissait pas avant que la maison d’édition Médiaspaul lui demande de jeter un coup d’œil à son manuscrit. Elle, qui n’a «jamais vécu dans la pauvreté», y a découvert «le témoignage vibrant et inspirant d’une femme qui a véritablement souffert d’un immense dénuement».
Un livre hautement éducatif, plaide-t-elle, car bien des lecteurs y apprendront ce qu’est concrètement la pauvreté au Québec. «Je pense que 95% des gens au Québec ne savent pas qu’une personne assistée sociale, dite apte au travail, reçoit actuellement 623 $ par mois», ajoute la députée qui évoque d’autres chiffres et statistiques.
Dans ce témoignage-choc de Nicole Croteau, on ne trouve qu’un seul chiffre qui a bouleversé Françoise David. «Dès les premières années de ma dégringolade, j’ai vu s’éloigner plus de la moitié de mes amies», écrit avec douleur l’auteure. «Ça m’a sciée de lire cela», murmure-t-elle.
Pas de chiffres donc, mais beaucoup de mots qui racontent la pauvreté de l’intérieur. Devant la centaine de personnes présentes au lancement de son livre, Nicole Croteau a résumé ainsi ce qu’elle a vécu. Recevoir des prestations d’aide sociale, «c’est ne pas savoir si on va manger, c’est avoir froid en hiver, c’est ne pas savoir si on pourra conserver son logement».
Elle a ajouté que «c’est aussi beaucoup de détresse et un risque de dépression, parce qu’on est isolée. C’est être malade, parce qu’on gèle, parce qu’on ne mange pas, parce qu’on ne dort pas bien.»
En rédigeant ces notes personnelles sur «le saccage de mes rêves et la désolation qui s’en est suivie», Nicole Croteau veut «sensibiliser le lecteur à la réalité des personnes projetées dans la précarité, aux prises avec des contraintes croissantes et bientôt ostracisées tant par leurs pairs que par la société, qui stigmatise ses citoyens fragilisés».
«Lisez ce livre», écrit en préface Françoise David. «Vous serez touchés, indignés, mobilisés.» C’est ce qu’elle répètera la semaine prochaine au premier ministre Couillard et au ministre Blais en leur tendant des exemplaires autographiés d’Heureux les pauvres?
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Nicole Croteau
Heureux les pauvres?
Médiaspaul, 2016
156 pages