Postes Canada a apporté Hanouka dans une petite ville du Québec qui porte le nom d’un ancien premier ministre juif de Grande-Bretagne.
Par Ellin Bessner
L’unique bureau de poste de Disraeli, dont la population est d’environ 2 500 habitants, abrite désormais le tout premier cachet d’oblitération illustré juif permanent à être créé pour le courrier au Canada, montrant quatre dreidels et une menorah entièrement allumée.
Disraeli est situé à environ une heure de Sherbrooke. Nathalie Fortier, la maître de poste, admet qu’elle n’avait jamais entendu parler de Hanouka auparavant, ni du politicien Benjamin Disraeli, qui s’est plus tard identifié comme chrétien – ce qui lui a permis de poursuivre une carrière dans la fonction publique.
Mais tout a changé depuis qu’Irv Osterer, un passionné de timbres vivant à Ottawa, lui a écrit au sujet de son projet de créer le tout premier cachet d’oblitération permanent à thématique juive du Canada.
«J’ai accepté de participer parce que je ne connaissais pas l’histoire de Disraeli, et j’ai eu beaucoup de chance de le faire, même s’il n’y a pas de juifs dans cette région», a déclaré Mme Fortier au Canadian Jewish News.
M. Osterer est un enseignant d’Ottawa à la retraite. Il est également graphiste. Il y a trois ans, il a demandé à Postes Canada de créer un cachet postal spécial pour les juifs. Il y a environ 50 communautés au Canada qui ont leurs propres cachets postaux uniques à l’année, dont le plus célèbre au bureau de poste de Vulcan, en Alberta: en 2016, le leur honorait le défunt acteur juif Leonard Nimoy, qui jouait Spock dans Star Trek.
«Lorsque j’enseignais au secondaire, j’avais l’habitude de faire participer mes élèves à la réalisation des cachets de Noël à l’île Christmas (Nouvelle-Écosse), et de ceux de la Saint-Valentin à Love, en Saskatchewan», a déclaré M. Osterer. «Les maîtres de poste de ces endroits adorent recevoir des lettres du monde entier. C’est une célébration de notre diversité dans ce pays.»
Edenbridge, en Saskatchewan, ou Disraeli, au Québec?
M. Osterer devait trouver un lieu qui résonne auprès des juifs canadiens, ou dont le nom a une consonance juive. Il a d’abord pensé à Vulcan, mais il y en avait déjà un. Il a donc envisagé Edenbridge, une ancienne colonie agricole juive de la Saskatchewan.
Un des amis de M. Osterer, le regretté Motti Feldman, avait de la famille là-bas. Des juifs de Lituanie sont arrivés via l’Afrique du Sud au début du XXe siècle pour fonder une communauté agricole près de Brooksby et ont trouvé un nom qui leur serait significatif, tout en étant accepté par la province.
«Il y avait un bureau de poste à cet endroit, mais il n’existe plus», a déclaré M. Osterer, expliquant pourquoi il devait trouver un plan B.
«Puis je regarde et je me souviens qu’il y a un endroit au Québec qui porte le nom de Benjamin Disraeli. Et comment un nom pourrait-il être plus juif, alors?»
Disraeli est né dans une famille juive en Angleterre en 1804, et bien que cette figure de l’ère victorienne se soit convertie au christianisme à l’adolescence, le politicien conservateur est resté fier de ses racines juives. Il a souffert de l’antisémitisme au cours de sa longue carrière politique. Il était proche des Rothschild et soutenait la création d’un État pour le peuple juif.
«Alors j’ai pensé, si ça ne pouvait pas être Edenbridge, Disraeli semble être un nom génial.»
Des dreidels et une menorah pour concept
En octobre, Postes Canada a informé M. Osterer que sa proposition avait été acceptée. Habituellement, ce sont des designers internes qui réalisent les cachets postaux artistiques spéciaux, mais M. Osterer voulait s’assurer que ce serait fait correctement, selon les traditions juives.
En 2017, une série de timbres-poste de Hanouka a dû être rappelée à la hâte le jour où Postes Canada les a mis en vente, car la couverture du livret présentait une étoile de David jaune – un détail embarrassant, blessant pour les survivants de la Shoah, qui n’a vraisemblablement été remarqué qu’après coup.
«Je vais faire en sorte que vous puissiez l’utiliser et que vous n’ayez pas de problèmes avec ça», a déclaré M. Osterer. Ils ont hésité et j’ai dit: « Je veux le faire, surtout en mémoire du rabbin [Reuven] Bulka, car il a participé à la production des timbres de Hanouka [après le fiasco de 2017].»
Le dessin devait être à peu près de la taille d’une pièce de deux dollars canadiens. M. Osterer a mis quatre dreidels en bas, avec les mots Nes Gadol Haya Sham [trad. « un grand miracle est survenu là »], et une menorah entièrement allumée avec huit flammes et la flamme centrale appelée shamash.
Il reste beaucoup d’espace pour la date et le nom de la ville.
Postes Canada n’a pas payé pour ce travail. Un porte-parole a déclaré que l’ensemble du projet de cachet d’oblitération avait coûté environ 100 $.
Près de deux douzaines de demandes à ce jour
Selon Elia Anoia, gestionnaire des services de timbres de Postes Canada, c’est la première fois qu’un motif est adopté par une personne extérieure au service postal et la première fois que le bureau de poste adopte un cachet d’oblitération permanent sur le thème du judaïsme.
La maître de poste, Nathalie Fortier, appose elle-même le cachet postal à la main, à l’aide d’un tampon encreur. Les cartes et les lettres ne passent pas par une machine et sont traitées «avec précaution» pour éviter d’effacer le cachet.
Jusqu’à présent, elle a reçu des demandes d’une vingtaine de clients, de l’Ouest canadien, des États-Unis, du Japon et de Sibérie.
Certains, comme M. Osterer, lui ont demandé d’oblitérer des enveloppes portant les nouveaux timbres de Hanouka 2021, qu’il enverra ensuite en cadeau à d’autres amateurs et collectionneurs de timbres.
Mme Fortier pense que certaines des demandes contenaient des cartes de vœux pour Hanouka envoyées par des personnes juives à leurs proches juifs.
Bien qu’elle traite habituellement 200 à 300 lettres et colis par jour à Disraeli, elle utilise le cachet d’oblitération de Hanouka sur toutes ses pièces, même les cartes de Noël.
«Les gens peuvent le voir et s’informer sur Hanouka», a déclaré Mme Fortier, ajoutant que son bureau de poste vend également les carnets de timbres saisonniers, qui contiennent des informations sur la fête juive et les coutumes correspondantes. «Nous sommes catholiques mais nous sommes des âmes accueillantes et nous sommes ouverts à l’apprentissage d’autres religions, parce que c’est amusant d’apprendre ces choses.»
Elle sait que Hanouka se termine le 6 décembre cette année, mais elle a l’intention de continuer à utiliser le cachet de la poste pendant longtemps – en janvier, et même au-delà.
La demande devrait augmenter l’année prochaine
Cette année, Hanouka a commencé plus tôt en novembre et Postes Canada n’a pas fait beaucoup de publicité pour cette nouvelle initiative de Disraeli, mais Irv Osterer espère que la maître de poste sera beaucoup plus sollicitée lors de la prochaine célébration.
Il fera lui-même passer le mot, en soumettant des articles à des revues philatéliques internationales, au bulletin de la Société historique juive d’Ottawa et à son réseau de passionnés de timbres dans le monde entier.
Il espère que les écoles juives participeront à l’événement et que les élèves apprendront la géographie et l’histoire des juifs en envoyant des lettres et des cartes à Disraeli pour obtenir ce cachet d’oblitération unique.
«Je pense que l’année prochaine, [Mme Fortier] verra au moins le double, sinon plus, du nombre de lettres qui lui parviennent. Et je pense qu’elle s’éclate probablement aussi.»
Pour obtenir le cachet d’oblitération de Hanouka, envoyez une enveloppe timbrée contenant vos lettres ou cartes, déjà affranchies, à cette adresse:
Maître de Poste
210 rue St-Joseph Est
Disraeli, Québec
G0N 1E0
La version originale anglaise de ce texte a été publiée le 5 décembre 2021 par The Canadian Jewish News.