En ce lundi 26 mars 1894, l’inauguration de la cathédrale Saint-Jacques-le-Majeur (appelée erronément Saint-Jacques-le-Mineur) occupe trois longues colonnes à la une du journal La Minerve.
La veille, le jour de la fête de Pâques, « Mgr [Édouard-Charles] Fabre a célébré, pour la première fois, la messe dans la nouvelle cathédrale », peut-on lire dans ce long texte. Cette cathédrale, dont Mgr Ignace Bourget bénissait la première pierre le 28 août 1870, remplace l’ancienne cathédrale Saint-Jacques, réduite en cendres 42 ans plus tôt, en 1852.
Le journaliste de La Minerve décrit tous les éléments de cette imposante célébration, « une des plus belles qui ait eu lieu à Montréal ». Mais nulle part dans son texte ne fait-il mention de la consécration officielle de nouveau lieu de culte.
Non, le scribe anonyme n’a pas commis une autre erreur. La basilique-cathédrale Marie-Reine-du-Monde – sa nouvelle appellation depuis 1955 – n’a tout simplement jamais été consacrée. Elle le sera officiellement ce vendredi soir, 13 octobre 2017, a annoncé l’archevêque de Montréal, Christian Lépine.
« Une église doit être entièrement payée lorsqu’on la consacre », explique Robert Gendreau, directeur du Service de la pastorale liturgique de l’archidiocèse de Montréal. « C’est une tradition que l’on respecte », peu importe que ce soit une petite église ou une immense basilique.
La construction de la cathédrale de Montréal, une réplique réduite de la basilique Saint-Pierre-de-Rome, « a entraîné des coûts énormes et cela a pris de nombreuses années, trente, quarante ans, avant d’éliminer ses dettes », ajoute l’abbé Gendreau.
Il explique aussi qu’on a longtemps caressé le projet de doter tout l’édifice de la même somptueuse décoration (marbre italien, mosaïques multicolores) qu’affiche la petite chapelle funéraire des évêques de Montréal, à gauche de l’église. Lorsqu’on a finalement abandonné ce projet, « personne ne s’est dit qu’il fallait consacrer la cathédrale ».
« Les générations passant, cela a été oublié. Ou bien, on a pensé que la cathédrale avait déjà été consacrée », dit le liturgiste.
Des croix du Moyen-Orient
Vendredi soir, Mgr Lépine présidera la consécration officielle de la cathédrale. Il bénira notamment douze petites croix, habituellement peintes ou gravées sur les murs intérieurs des églises lors de leur dédicace. Puisque la cathédrale de Montréal est une réplique de celle de Rome, « les croix seront des répliques des croix de consécration qui se trouvent à la basilique Saint-Pierre », confie l’abbé Gendreau.
Elles ont été fabriqués par des chrétiens originaires d’Irak actuellement réfugiés en Jordanie. Il y a un an, le Patriarcat latin de Jérusalem a lancé, dans la ville jordanienne de Madaba, l’atelier Mosaïque vivante (Living Mosaics), où des réfugiés apprennent à confectionner des mosaïques.
« Les mosaïques des Irakiens de Madaba habillent plusieurs églises jordaniennes. Des fresques entières ont déjà été exportées jusqu’au Canada », indique le site Web du Patriarcat latin de Jérusalem. On pourrait corriger ce texte et indiquer que des œuvres de ces artisans qui ont fui la terreur de l’État islamique ornent dorénavant les murs de la cathédrale catholique de Montréal, qui vient tout juste d’être consacrée.