Un anniversaire spécial s’apprête à être célébré au sein de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec (AECQ) : les 35 ans de carrière de leur adjoint au secrétaire général, Germain Tremblay. Dans quelques mois, celui qui a vu défiler plusieurs générations d’évêques franchira un cap qu’il n’avait pas l’intention d’atteindre lorsqu’il est entré en poste dans l’organisation. Discussion, confessions et réflexions.
Rien ne prédestinait Germain Tremblay à une carrière aussi pérenne dans les rangs de l’AECQ. Titulaire d’un baccalauréat en théologie de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), il a fait ses débuts professionnels du côté du diocèse de Saint-Jean-Longueuil, où il était agent de pastorale en paroisse. Au bout de presque six années passées à œuvrer sur le terrain, il envisageait un retour aux études dans l’optique de suivre une maîtrise en parallèle avec l’animation pastorale.
«Puis à la fin de l’hiver, quelqu’un m’a rejoint pour me dire qu’il avait proposé mon nom pour un poste ouvert à l’AECQ. Je l’ai remercié, en disant que cela ne m’intéressait pas. Quelques semaines après, une deuxième personne est arrivée avec la même chose. Je me suis dit que j’allais au moins honorer ces démarches, donc j’ai envoyé mon CV en me disant que je n’avais rien à perdre. J’ai passé l’entrevue et plusieurs jours plus tard j’ai reçu un appel pour me dire que j’avais le poste», raconte Germain Tremblay en précisant qu’il n’a ressenti aucun stress lors du processus d’embauche, car il n’a jamais eu de plan de carrière défini.
Un métier passion

C’est ainsi que, le 5 septembre 1991, à l’âge de 28 ans, Germain Tremblay a entamé sa première journée de travail à l’AECQ. À la suite d’une brève rencontre avec le secrétaire général de l’époque, il se souvient avoir eu le sentiment d’être plongé dans un «vent de brouillard assez épais» lorsqu’il s’est retrouvé seul dans son bureau, entouré de documents en tous genres. «C’était quelque chose de neuf, de gros et d’un peu épeurant», concède ce dernier.
Même si les règles ont changé juste après son entrée en fonction, son mandat de trois ans n’était renouvelable qu’une fois à l’origine. «Dans ma sixième année, qui devait être ma dernière, un ami m’a demandé si je voulais renouveler. Je lui ai dit oui, probablement une fois. Je lui ai dit qu’une chose était certaine : je ne serai pas là 20 ans. Et là, j’entame ma 35e année», relate Germain Tremblay avec un large sourire.
Si d’indénombrables éléments ont nourri sa passion au fil des années, deux dimensions se sont révélées particulièrement marquantes dans l’exercice de son travail. «La première, c’est que j’aime l’Église. Je la compare souvent à ma famille. La communauté, pour moi, ce n’est pas théorique : il faut s’impliquer, avoir les pieds sur le terrain et les mains dans la pâte», explique-t-il en affirmant que son travail fait partie de son ADN. «Deuxièmement, en travaillant pour l’assemblée des évêques, j’ai à fréquenter ces hommes que j’ai appris à connaître, à aimer, à admirer.»
Les évêques : moins connus, moins admirés, moins glorieux
Le regard qu’il porte sur eux est d’autant plus admiratif que, selon lui, les évêques d’aujourd’hui bénéficient d’une réputation ternie par les scandales liés à l’Église. «Il y a 35 ans, on n’était pas dans ça. On était encore dans les derniers relents d’une Église qui avait été plus présente, certains diront plus triomphaliste. Quand on parle d’un évêque, les jeunes générations se demandent ce qu’il est», appuie Germain Tremblay en décrivant le moment où la religion est sortie des écoles comme étant «une cassure importante pour la place de la religion dans la société».
Aujourd’hui âgé de 62 ans, l’adjoint au secrétaire général de l’AECQ a donc passé plus de la moitié de sa vie dans l’organisation. Lorsqu’il évoque les moments marquants de sa carrière, deux événements lui reviennent spontanément en mémoire : un colloque de trois ans de préparation organisé en 2001 à l’Université Laval, ainsi qu’un projet nommé Venez à l’écart, une démarche initiée par l’Église en 2011 qui offre à divers acteurs de la communauté catholique québécoise l’opportunité de se rencontrer pour échanger.
Un regard optimiste
Lorsque nous lui demandons ce qu’il a appris durant toutes ces années, sa réponse est assez évocatrice : «beaucoup de choses», s’exclame-t-il avant d’enchaîner sur l’humilité. «Mon travail m’a amené à devenir humble, c’est-à-dire à me reconnaître tel que je suis, avec mes forces et mes faiblesses.»
L’autre partie de son propos porte sur la connaissance du milieu religieux. «Dans cette sphère d’activité qui concerne les évêques, avec les responsabilités qu’ils ont, j’ai appris que cela pouvait ne pas être aussi glorieux que cela pouvait paraître aux yeux des autres, mais que c’était beaucoup plus beau que ce que les gens peuvent voir. Entendre des évêques réfléchir, penser, faire des choix, je trouve que je suis sur un siège particulier qui me permet d’apprécier cela», soutient Germain Tremblay en évoquant également les nombreuses rencontres qu’il a faites sur le terrain.
Malgré les défis auxquels l’Église est confrontée, ce laïc voit d’un bon œil le futur de l’Église catholique québécoise. «Je pense que la pauvreté est une chance pour l’Église et je n’ai pas peur pour son avenir. Parce que l’essence même de l’Église, c’est d’aider les autres et particulièrement les plus pauvres. Et pour prendre soin des pauvres, il faut que nous soyons pauvres nous aussi. Je ne souhaite pas que l’Église redevienne ce qu’elle était avant. Elle retrouvera sa pertinence totale lorsque les gens pourront dire qu’elle sert», argumente-t-il, optimiste.
En attendant, l’adjoint au secrétaire général de l’AECQ poursuit sa mission et n’est plus qu’à quelques mois de souffler les bougies de son 35e anniversaire de carrière. Jusqu’à quand ? «La plupart des évêques travaillent jusqu’à 75 ans et plus. Moi, à 75 ans, je serai probablement à la retraite depuis quelques années déjà» laisse échapper Germain Tremblay.





































