Le cardinal Marc Ouellet, archevêque émérite de Québec et préfet émérite du dicastère pour les Évêques, fête ses 80 ans le samedi 8 juin 2024.
Dans l’Église catholique, tout cardinal qui atteint cet âge ne peut plus « entrer au conclave ». En raison de cette règle, il ne pourra donc pas participer à l’élection du successeur du pape François lorsque ce dernier démissionnera ou décèdera.
C’est le pape Jean-Paul II qui a créé cardinal l’archevêque de Québec lors du consistoire du 21 octobre 2003. Le cardinal Ouellet a participé au conclave de 2005 qui a élu le pape Benoît XVI, de même qu’à celui de 2013 qui a élu le pape François.
En 1970, le pape Paul VI a fixé à 80 ans l’âge auquel les cardinaux perdent « le droit d’élire le pontife romain et, par conséquent, également le droit d’entrer en conclave », précisent les services d’information du Vatican.
Quand un évêque est créé cardinal, il joint alors le Collège des cardinaux (aussi appelé le Collège cardinalice). Les quelque 250 cardinaux du monde entier, toujours choisis par le pape, sont « remarquables par leur doctrine, leurs mœurs, leur piété et leur prudence dans la conduite des affaires », stipule l’article 351 du Code de droit canonique. Les cardinaux conseillent le pape dans sa gouvernance de l’Église catholique et sont responsables de l’élection de son successeur.
Statistiques
En date du 8 juin 2024, jour d’anniversaire du cardinal Ouellet, le Collège des cardinaux compte 236 membres, soit 126 électeurs et 110 non-électeurs. Seuls sept cardinaux nommés par le pape Jean-Paul II n’ont pas encore atteint l’âge de 80 ans. Vingt-sept cardinaux électeurs ont été nommés sous Benoît XVI. Depuis son élection, le pape François a créé 130 cardinaux. De ce nombre, 92 ont aujourd’hui moins de 80 ans.
Six autres cardinaux vont célébrer leur 80e anniversaire d’ici la fin de l’année. Parmi ceux-ci, mentionnons le cardinal américain Seán Patrick O’Malley et le cardinal français Jean-Pierre Ricard.
Quatre Canadiens sont actuellement membres du Collège cardinalice. Trois d’entre eux ont moins de 80 ans. Ce sont les cardinaux Michael Czerny (né en 1946), Thomas Collins (né en 1947) et Gérald Lacroix (né en 1957).
Le cardinal Collins est l’archevêque émérite de Toronto tandis que le cardinal Czerny, un jésuite comme le pape François, est l’actuel préfet du dicastère pour le Service du Développement humain intégral. Le cardinal Lacroix est l’archevêque de Québec et le primat de l’Église canadienne. Son prédécesseur était le cardinal Marc Ouellet.
Biographie
Né le 8 juin 1944 à La Motte, près d’Amos en Abitibi, le futur cardinal Ouellet a été ordonné prêtre pour le diocèse d’Amos en mai 1968.
Dès 1970, il se rend en Colombie enseigner la philosophie au Grand Séminaire de Bogota, une institution dirigée par la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice (les sulpiciens) dont il devient alors membre. En 1974, il sera professeur au Grand Séminaire de Manizales en Colombie. Deux années plus tard, il occupera le même poste au Grand Séminaire de Montréal. Après des études à Rome, il retourne en Colombie où il sera nommé recteur du Grand Séminaire de Manizales de 1984 à 1989. En 1990, c’est le Grand Séminaire de Montréal qui l’accueille comme recteur. De 1996 à 2002, il est professeur titulaire à l’Université pontificale du Latran à Rome.
Le pape Jean-Paul II le nomme secrétaire du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens en mars 2001 et préside son ordination épiscopale dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Une année plus tard, il le nomme archevêque de Québec. Le cardinal Ouellet présidera le plus ancien diocèse de toute l’Amérique du Nord jusqu’en 2010. Il est ensuite nommé, à Rome, préfet de la congrégation pour les Évêques (aujourd’hui appelé dicastère pour les Évêques).
Le 30 janvier 2023, le Bureau de presse du Saint-Siège annonce que « le Saint-Père a accepté la démission des fonctions de préfet du dicastère pour les Évêques et de président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine, présentée par Son Éminence le cardinal Marc Ouellet. »
Mentionnons que c’est en 2019 que cardinal Ouellet avait officiellement remis sa démission, ayant atteint l’âge de 75 ans – l’âge de la retraite obligatoire pour tout évêque. Le pape François n’avait toutefois pas accepté sa renonciation et avait prolongé son mandat à la tête du dicastère pour les Évêques.
Affaires judiciaires
La démission du cardinal Marc Ouellet a été acceptée alors que son nom était mentionné dans deux plaintes pour inconduite sexuelle ou comportement inapproprié dont le pape François a pris connaissance en septembre 2020 et en janvier 2021. L’ex-archevêque de Québec a toujours nié « avoir commis tout comportement répréhensible ».
En décembre 2022, le cardinal Marc Ouellet annonce qu’il poursuit une ex-agente de pastorale pour propos diffamatoires. Il affirme que le 16 août 2022, cette femme, connue par la seule initiale F, aurait porté contre lui des accusations d’agressions sexuelles dans le cadre de l’action collective contre l’archidiocèse de Québec.
« Pour un membre du clergé, une allégation d’agression ou d’inconduite sexuelle est la pire tache qu’on puisse avoir à son dossier », écrivent les avocats du cardinal Ouellet qui ajoutent que la « réputation à l’international » du cardinal « est donc sérieusement entachée par ces fausses allégations ». Depuis le dépôt de l’action collective, le cardinal vit « une angoisse psychologique importante », indiquent aussi ses avocats.
Pour cette « atteinte importante à sa réputation », une somme de 100 000 $ est réclamée à titre de dommages compensatoires. Si le cardinal obtient gain de cause, cette somme « sera versée au profit de la lutte contre les abus sexuels subis par les Autochtones du Canada », insistent ses avocats.
En juin 2023, les avocats qui défendent Paméla Groleau – celle qui était connue par l’initiale F et qui a quitté son anonymat en janvier 2023 – indiquent qu’ils ont reçu deux autres plaintes contre le cardinal. Les deux victimes alléguées entendent témoigner lors du procès en diffamation. (Voir Affaire Marc Ouellet: d’autres gestes inappropriés révélés.)
En France, le cardinal Ouellet est poursuivi par une religieuse qu’il aurait expulsée « sans motif » de son ordre, les Dominicaines du Saint-Esprit, après 34 ans de vie consacrée. Le tribunal judiciaire de Lorient donne raison à la religieuse le 3 avril 2024 et condamne le cardinal, sa congrégation et les deux visiteurs apostoliques nommés par le Vatican à lui verser conjointement 202 400 euros (près de 300 000 $) pour préjudices matériels et moraux. Le cardinal était même condamné à verser la moitié de cette somme, qu’il y ait appel ou non de cette décision judiciaire, avait expliqué l’avocate de la religieuse à Présence.
Dix jours plus tard, le Vatican annonce qu’une note verbale a été présentée à l’ambassade de France près le Saint-Siège. En se mêlant de la « discipline interne » d’un institut religieux, la justice française « pourrait avoir donné lieu à une grave violation des droits fondamentaux à la liberté religieuse et à la liberté d’association des fidèles catholiques », indique-t-on. (Voir Le Vatican déplore une « grave violation » de la liberté religieuse.)